Mort de Michael K. Williams, sublime Omar de “The Wire” et acteur militant
#PierreLanglais le 07/09/21
Il restera à jamais #OmarLittle, gangster culte à belle gueule balafrée. Michael Kenneth Williams, comédien à la jeunesse douloureuse, devenu danseur, mannequin et second rôle marquant du petit écran américain, est mort subitement lundi 6 septembre. Il avait 54 ans.
La cicatrice lui barrait le visage, coupant son front en deux pour finir sur sa pommette droite. Un souvenir d’une bagarre qui avait mal tourné, la trace d’un passé violent. #MichaelKennethWilliams savait jouer les gangsters, de #TheWire (2002-2008) à The Night Of (2016) en passant par #BoardwalkEmpire (2010-2014). Il a été retrouvé mort lundi 6 septembre dans son appartement new-yorkais, possiblement d’une overdose, selon la police. Il avait 54 ans.
Élevé dans un quartier défavorisé de Brooklyn, toxicomane au début de sa vie d’adulte, il aurait pu lui-même devenir criminel. Il s’est en sorti grâce à la danse. À 23 ans, fasciné par l’album de Janet Jackson Rhythm Nation 1814, il plaque ses études, enchaîne les auditions pour des labels new-yorkais, dort dans la rue une nuit sur deux, et parvient à décrocher une place dans les troupes qui accompagnent Madonna et George Michael en tournée. Son visage marqué et son sourire carnassier lui offrent des petits rôles de truands dans des clips, puis attirent l’œil des photographes, dont David #LaChappelle, qui l’immortalise au début des années 1990. Le rappeur Tupac Shakur tombe sur un de ces portraits, et le fait embaucher dans son film Bullet, en 1996. Sa carrière d’acteur est lancée.
Dans The Wire, la série qui relança sa carrière alors qu’il s’apprêtait à changer de voie.
Michael K. Williams restera à jamais #Omar, personnage atypique du polar politique The Wire de #DavidSimon, braqueur de dealer au « code » inflexible, craint de tous dans les cités de #Baltimore, et – petite révolution – gay. « J’ai débarqué sur le tournage complètement ignorant, incapable de considérer une œuvre dans toute sa complexité », nous racontait-il lors d’une rencontre au festival CanneSéries, en 2018. Il en ressortira acteur culte, célébré par Barack Obama, sa carrière relancée alors qu’il s’apprêtait à changer de voie à la veille du tournage.
“Je veux qu’on puisse comprendre tous mes personnages, même les ‘méchants’.”
Aperçu dans une foule de séries au lendemain de The Wire, d’Alias aux Experts en passant par New York, police judiciaire, il pose à nouveau ses valises en 2010 pour Boardwalk Empire, #série sur la prohibition produite et réalisée par Martin Scorsese. Il y incarne Chalky White, puissant gangster d’Atlantic City. En 2016, il joue le codétenu du personnage principal de The Night Of, minisérie dans les entrailles du système judiciaire américain, avant d’incarner l’an dernier un des héros de Lovecraft Country, aventure historico-fantastique dans l’Amérique raciste des années 1950 – un rôle qui lui vaut une nomination aux prochains #EmmyAwards, qui auront lieu le 19 septembre.
« Je cherche inlassablement la compassion des téléspectateurs. Je veux qu’on puisse comprendre tous mes personnages, même les “méchants” », nous expliquait-il de sa voix grave, silhouette affûtée, collier de barbe blanche et regard attentif. Le gangster de fiction était devenu grand frère dans la réalité. Il continuait à fréquenter la cité de son enfance, produisait des documentaires, dont il était le narrateur, pour souligner les injustices dont souffrent ceux qui sont nés, comme lui, dans ces zones oubliées de l’Amérique (1). Il se dégageait de lui une douceur, une fragilité insoupçonnable, qui se transformait en passion quand il parlait de ses engagements. « Je suis acteur avant d’être militant, insistait-il pourtant lors de notre rencontre. Je n’arrive pas sur un tournage pour défendre des idées, mais pour réfléchir à la condition humaine. Je ne me demande pas quel message véhicule la série, mais qui est ce type qu’on me demande d’incarner : d’où vient-il ? Quels sont ses défauts ? Ce qui m’attire, ce sont les failles. J’aime les personnages brisés. » La mort subite de #MichaelKWilliams le fait entrer, plus que jamais, dans cette catégorie.
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