Un cercueil biodigesteur à partir de champignons ?...

Aux Pays-Bas, un biodesigner a conçu un cercueil d'un nouveau genre appelé "Living Cocoon". Sa particularité : il est fabriqué à partir de champignons, plus exactement de mycélium. Une composition qui permettrait notamment au défunt de se décomposer plus rapidement.

Lutter contre les déchets, réduire sa consommation, limiter les transports polluants... A travers le monde, les citoyens sont de plus en plus nombreux à surveiller leur impact environnemental. De leur vivant. Mais qu'en est-il après la mort ? Les études demeurent rares. Pourtant, les diverses pratiques associées à la mort sont loin d'avoir un coût négligeable sur notre planète.

En 2017, les Services funéraires de la Ville de Paris ont publié une étude inédite sur l'empreinte environnementale des rites funéraires. Les résultats ont montré que l'inhumation équivalait à 11% des émissions d'un Français moyen en un an. Soit l'émission en moyenne de 430 kilogrammes de CO2. Du moins en fonction des "options" choisies.

Lieu d'inhumation, transport, composition du cercueil... Ces dernières années, diverses alternatives ont vu le jour pour rendre la fin de vie plus écologique. Aux Pays-Bas, c'est un cercueil d'un nouveau genre qui vient de sortir de l'imagination d'un biodesigner. Un cercueil "vivant" capable notamment d'accélérer la décomposition du défunt. Son nom : Living Cocoon (en français, "cocon vivant").

Nous sommes des nutriments, pas des déchets
"Le Living Cocoon permet aux gens de refaire corps avec la nature et d'enrichir le sol, plutôt que de le polluer", explique dans un communiqué Bob Hendrikx, créateur du cercueil et ancien étudiant de l'université de technologie de Delft. Le secret réside dans la composition du "cocon". Il est conçu à partir de champignons et plus exactement de mycélium, l'ensemble de filaments qui se trouve dans le sol.

Ce réseau souterrain est un "système de recyclage naturel", affirme le biodesigner de 26 ans. "Dans l'environnement, il cherche constamment des déchets à convertir en nutriments. Il fait de même avec les substances toxiques dont le pétrole, le plastique et le métal". Grâce au mycélium qu'il recèle, le cercueil vise ainsi à recréer le processus avec le corps des défunts.
Le mycélium est un "système de recyclage naturel" qui convertit les déchets en nutriments. Loop

L'objectif est "de nourrir la terre avec nos corps. Nous sommes des nutriments, pas des déchets", assure Bob Hendrikx. Dans un cercueil traditionnel, le corps humain peut mettre plus d'une décennie à se décomposer. La faute au bois vernis qui compose le coffre, au métal qui peut s'y trouver ou encore aux vêtements synthétiques qui ralentissent généralement le processus.

D'après son concepteur, le Living Cocoon serait capable d'accélérer considérablement le phénomène. Une fois mis en terre, le cercueil serait absorbé dans le sol en un mois à six semaines et contribuerait activement à décomposer le corps en deux à trois ans. En plus de convertir les déchets en nutriments, il permettrait également d'améliorer la qualité du sol environnant et de favoriser la pousse de jeunes plants.

Déjà en vente
Des tests pratiques ont déjà été menés par la firme américaine Ecovative, spécialisée dans les matériaux à base de mycélium, qui collabore avec la start-up Loop fondée par Bob Hendrikx. Les résultats ont montré que le cercueil se retrouve absorbé dans le sol en 30 à 45 jours dans les conditions rencontrées aux Pays-Bas. L'impact de l'invention sur le sol environnant reste cependant à évaluer plus précisément.

"Nous voulons savoir exactement quelle contribution cela apporte au sol parce que cela nous aidera à convaincre dans le futur les municipalités locales de transformer des zones polluées en zones boisées saines, en utilisant nos corps comme nutriments", souligne le biodesigneur dont le cercueil contient également une couche de mousse végétale qui contribue à la décomposition.
Bob Hendrikx aux côtés de son invention, le "premier cercueil vivant".

Après plusieurs mois d'expérimentation, les premières funérailles utilisant un Living Cocoon ont déjà eu lieu aux Pays-Bas, la semaine dernière. Et les "cocons" sont désormais disponibles à la vente en collaboration avec deux coopératives funéraires de La Hague, CUVO et De Laatste Eer, au prix de 2.000 euros pour les cent premiers selon le site officiel.

Bob Hendrikx espère toutefois réduire le coût en intensifiant la production des cercueils. Pour les concevoir, le mycélium doit être cultivé, sans utilisation d'électricité ni de lumière artificielle, pendant sept jours durant lesquels il adopte la forme du coffre. Ce dernier est ensuite séché naturellement, ce qui interrompt la croissance des filaments et permet de renforcer sa structure.

Si le concept du Living Cocoon est inédit, d'autres inventions funéraires à base de mycélium ont déjà vu le jour. En mai 2019, la fille de Luke Perry, acteur de la série Beverly Hills décédé à l'âge de 52 ans, a ainsi révélé que son père avait été enterré dans un "Infinity Burial Suit", un costume conçu par la firme Coeio contenant également du mycélium.

Bien que diverses alternatives existent à travers le monde, il est à noter que les rites funéraires restent très encadrés en France, y compris le choix du cercueil qui doit respecter certaines exigences en termes de solidité, d’étanchéité et de biodégradabilité notamment.

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L’article est paru sur Géo. Il y a 6 trackers sur l’article du site. Le lien est, à vos risques et périls : www.geo.fr/environnement/pays-bas-un-biodesigner-cree-un-cercueil-vivant-fabrique-a-partir-de-champignons-202097