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Il avait enfoncé les yeux d’un jeune exilé : le policier condamné par la vidéosurveillance
Un policier a été condamné pour des violences commises sur un jeune libyen de 22 ans. Il lui avait enfoncé les pouces dans les yeux alors que la victime était plaquée sur un banc contre un mur. Une agression violente qui a provoqué «une poche hémorragique de 2 mm» dans l’œil gauche de la victime, selon un rapport médical consulté par StreetPress. Une légère condamnation qui cache mal l’impunité des nombreux autres faits de violences commises par des surveillants du Centre de Rétention Administrative – CRA – de Toulouse.
Fin 2022, alors qu’il était enfermé au CRA de Toulouse depuis 45 jours, Samir – le prénom d’emprunt utilisé par Streetpress – est victime de violences barbares et gratuites de la part de deux surveillants, alors qu’il se trouve assis à une table pendant le repas du soir.
Dès le 4 décembre 2022, son témoignage est relayé par le collectif anti CRA de Toulouse : «On était en train de manger à la cantine, le policier a insulté un jeune, il a insulté sa mère, on a dit au policier pourquoi tu l’insultes, il est jeune, tu insultes la daronne, ça se fait pas. Il a pris mon copain, il l’a monté à la salle d’attente, il l’a tapé devant moi, je suis témoin, il lui a mis des tartes, des coups, il lui a mis des coups dans les yeux, il a eu du sang dans les yeux après. Il a un certificat médical. Y’a les vidéos aussi. Il a demandé à porter plainte. Et le policier a porté plainte avant.
Ils ont emmené mon copain en garde à vue, ensuite, ils l’ont ramené à 1 heure du matin ici au centre et juste après, ils l’ont transféré au centre de Perpignan. Moi aussi il m’a frappé, il m’a insulté. J’ai pas porté plainte, je suis témoin pour mon copain pour sa plainte».
Face aux images de vidéosurveillance le policier, Baptiste, se défend devant les enquêteurs de tout geste «volontaire» mais reconnaît que «ses mains ont ripé et ses doigts [se sont] étalées sur son visage pour le faire taire». Une défense habituelle, comme on a encore entendu de la part du policier Marc Antoine Castelain qui a mutilé Théo à coup de matraque métallique dans l’anus et qui a également écopé d’une peine de sursis simple.
La victime a été poussée dans l’angle mort de la salle, juste en-dessous de la caméra. «La victime disparaît de l’image au moment précis où le poing serré du brigadier se dirige vers sa poitrine». Samir assure qu’il a été roué de coups «comme un sac de boxe, frappé quatre ou cinq fois au visage et au corps». Mais les images de vidéo de surveillance sont alors inutilisables. Coïncidence troublante avec l’affaire de Bobigny, où les policiers ont «par hasard» toujours l’habitude de prolonger les violences qu’ils assènent à l’abri des caméras.
Confronté aux vidéos accablantes, la version mensongère des policiers n’a pas tenu. Comme d’habitude, les policiers ont pourtant tenté de prendre les devant pour se protéger, en déposant plainte à l’encontre de Samir pour des faits de rébellion et de menace de crime contre une personnes dépositaire de l’autorité publique. À chaque nouveau cas avéré et filmé, on ne cesse de se demander : comment peut-on croire encore un mot de ce que raconte les représentants de l’autorité publique ?
À la vue des images, le tribunal de Toulouse n’a pu nier les premières violences subies par Samir. Le premier policier est donc reconnu coupable et condamné à une peine de quatre mois de sursis simple. Le second policier, en revanche, qui a su se positionner à l’abri des caméras pour continuer ses exactions violentes sur la jeune victime, a été relaxé… Aucune information n’a pu être trouvée sur la question d’une éventuelle sanction administrative ou suspension à l’encontre des deux policiers. Face au silence de la direction du CRA et du commissariat, on se doute que ces deux policiers continueront leur carrière paisiblement.
Ce type de condamnation est exceptionnel. Ces violences sont pourtant quotidiennes comme en témoignent les collectifs de soutien aux exilé-es et aux prisonnier-es. «Le centre de rétention de Toulouse – qui a enfermé 1.136 étrangers suspectés par l’administration d’être en situation irrégulière en 2022 – n’en est pas à sa première affaire de brutalité policière. La Défenseure des droits a reçu quatre saisines dénonçant des violences physiques contre des retenus depuis 2022. Les instructions sont toujours en cours».
Coïncidence troublante, l’une de ces plaintes vise le second policier impliqué dans les violences exercées sur le jeune Samir.
En effet, en mai 2023, un autre d’un prisonnier du CRA de Toulouse a dénoncé les violences cet agent, qui avait lui-même accusé sa victime de rébellion et outrage. Face aux soupçons évidents de violences commises par les agents de l’administration, la justice avait relaxé le jeune exilé algérien. Les vidéos de surveillance de cette scène étaient également accablantes : «on aurait dit qu’il était devenu un sac de pommes de terre, jeté au sol et tabassé» décrit l’avocate. Devant le juge, l’algérien assurait avoir «des bleus partout» sur son corps, frappé par plusieurs policiers et avoir même été utilisé comme un poids mort «pour ouvrir une porte».
Le parquet avait pourtant eu l’indécence de poursuivre la victime de ces violences policières. Une fois relaxé, celui-ci a déposé plainte contre les policiers qui l’avaient roué de coups. L’affaire est toujours en cours selon les informations de Streetpress.
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