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Gazette n°107 - mercredi 4 novembre 2020
LA HAINE
Le corbeau est un oiseau qui sert souvent le maléfice, la tristesse ou la peur, et pas seulement dans les livres, comme “Le corbeau” d’Edgar Allan-Poe. Ainsi dans “Vincent”, le dessin animé de Tim Burton, dans “Les oiseaux”, le film d’Hitchcock ou dans “Champ de blé aux corbeaux”, le tableau de Vincent Van Gogh...
Mais si l’en était autrement ? Si le corbeau était montré sous un jour favorable ?
...Il était une fois, dans un lointain pays, en des temps reculés, un vieil homme seul et désœuvré.
Pas exactement seul, en effet il partageait sa vie avec un corbeau. Il l’avait appelé Lucien, car c’était le prénom d’un de ses fils mort trop jeune. Et donc le corbeau se comportait presque comme un fils aimant, rendant quelques menus services au vieil homme : portant son courrier à la poste, protégeant son petit potager de ses congénères, le réveillant doucement du bout du bec, et bien d’autres offices. Lucien était apprécié de tous, autant que son “père”.
Le vieil homme gagnait sa pauvre vie en réparant les montres et les horloges que les gens lui confiaient. Il était apprécié de tous...
Tous ? Non ! Seul l’apothicaire du village avait une haine tenace envers le vieil artisan.
Chacun était au courant, et tous en savaient la raison :
« C’est parce que le vieil homme a refusé la main de sa fille au fils de l’apothicaire », disait les uns.
« C’est une vieille histoire de concours de billes, lorsqu’ils étaient gamins », disaient d’autres.
« C’est à cause de la gentillesse du vieil homme », disaient encore certains.
Et les derniers assuraient que c’était Lucien qui faisait peur à l’apothicaire.
...Bref, personne ne savait trop pourquoi l’apothicaire détestait le vieil homme. Et en fait personne n’y prêtait vraiment attention.
Seulement, un jour, l’apothicaire cria au vol de sa montre, et accusa le vieil homme.
Il disait tenir une preuve accablante du forfait : une plume noire qu’il disait avoir trouvé juste à côté de l’endroit où il posait sa montre. Ses deux fils et sa femme juraient avoir vu Lucien dérober l’objet.
Un gendarme vint chez le vieil homme pour arrêter Lucien et l’enfermer en attendant le procès.
Mais l’apothicaire, guidé de sa haine inextinguible, apparut soudainement, et visa le vieil homme avec son fusil.
Lucien voyant son “père” en danger, se précipita... il arracha de la poche de l’apothicaire la montre qui en dépassait. Mais il reçu la balle mortelle en plein cœur.
Il s’effondra sur le sol de la masure.
Le gendarme ne pût que constater les faits et emmena l’apothicaire en prison.
Le vieil homme, terrassé de douleur, n’eut que le temps de mettre sa main à son cœur, qui s’arrêta... comme toutes les horloges du village.
On enterra le vieil homme avec Lucien, et depuis, dans le village, il n’y a plus ni horloge, ni apothicairerie.
Épinac, le 4 novembre 2020
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En relation avec “Gazette” n°107, vous pouvez lire un extrait de “Le Roi semeur” de Patrick Boutin (Denis éditions, novembre 2020).
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