La filière forêt-bois veut nous bâillonner
Le 6 mai, nous étions au tribunal de Bordeaux à la demande d’un responsable de la filière bois. Notre crime : l’avoir présenté comme un « Président-gredin » dans une de nos vidéos.
D’un côté, il se présente comme un amoureux de la forêt et un président modèle de FIBOIS Nouvelle-Aquitaine. De l’autre, il est responsable d’une coupe rase de plus de 50 hectares, en forte pente, à l’entrée de Meymac en Corrèze, qui est une véritable honte. D’où notre petit clin d’œil taquin qui l’a fortement irrité. Lors de l’audience, il a tenté d’expliquer qu’il n’avait rien à voir avec cette coupe. Photos satellite et registre des entreprises à l’appui, nous avons démontré assez facilement le contraire, comme vous pouvez le lire dans cet article ou le voir dans cette vidéo (instagram). Verdict : le 17 juin.
Plus grave, nous avons compris qu’il s’agissait d’une manœuvre concertée de la filière pour nous faire taire. Le cabinet d’avocats choisi pour tenter de nous faire condamner est le même que celui mandaté en 2021 pour essayer, là aussi, de faire censurer une de nos vidéos (procès que nous avions gagné au passage). Surtout, lors de l’audience, ce cabinet a tenté de faire valoir des éléments compléments extérieurs à cette affaire et concernant notre campagne contre Alliance Forêts Bois. La multiplication de ce type de procédures à un nom : procès-bâillon.
Depuis plusieurs mois, nous dénonçons publiquement les dérives de cette coopérative forestière et son influence délétère sur les politiques publiques. Plutôt que de changer, elle multiplie les plaintes contre nous et incite d’autres acteurs à le faire. Le but : nous faire taire mais aussi nous décrédibiliser en essayant de faire croire que nous sommes responsables de « menace de mort » ou que nous sommes à l’origine de destructions d’engins forestiers.
Ce qui se joue vraiment : c’est une bataille d’influence comme nous l’expliquons dans cette vidéo où nous démasquons la stratégie de l’Union des Coopératives Forestières Françaises (UCFF). Le changement climatique est devenu un alibi bien pratique pour financer des coupes rases de peuplements abusivement qualifiés de « pauvres » ou de « vulnérables » et un reboisement, le plus souvent avec des résineux. Le bilan officiel du plan de relance confirme, en pire, le bilan que nous avions dressé en 2021 (linkedin) : plus de 10 000 hectares de coupes rases de forêts saines, 6500 hectares de coupes rases en zone Natura 2000 sans aucune étude d’impact environnemental. Ce qui les dérange, c’est que nous exposons publiquement ces scandales dans les médias. Comme dans le nouvel épisode de l’émission Sur Le Front diffusée le 26 février 2024.
Plutôt que d’accepter un débat public et contradictoire, la filière fait pression sur le ministère de l’Agriculture pour nous empêcher de participer aux réunions. Tout faire pour nous faire taire mais cela ne nous fera pas dévier de notre stratégie : continuer à documenter, exposer, analyser et décrypter avec rigueur, humour si besoin et aucune forme de violence, ce qui se joue. Oser dire publiquement pourquoi nous estimons que la nomination de l’ancien président de France Bois Forêt en tant que délégué interministériel à la forêt est une confusion des genres dérangeante. Nous savons qu’en faisant ça, nous irritons mais ce qui fait une démocratie vivante, c’est l’indépendance et la liberté d’expression des contre-pouvoirs. Pas les petits arrangements entre acteurs et les réunions à huis-clos ou les visioconférences sans micro.
Surtout, nous ne faisons pas que dénoncer, nous proposons de façon précise et argumentée. Sans relâche. C’est ainsi que nous arrivons à faire bouger les lignes comme je vous l’explique dans cet article qui analyse comment le nouveau règlement européen sur la déforestation va permettre de mieux encadrer les coupes rases.
Contre-attaque
Depuis plusieurs mois, nous avons pris un nouveau virage stratégique : nous aussi, nous allons porter plainte. C’est ce que nous avons commencé à faire pour contester le projet de création d’une nouvelle usine de granulés de bois en Limousin. Cette nouvelle usine pourrait aspirer du bois issu de coupes rases dans une rayon de 130 km autour de Guéret. C’est ce que nous avons déjà observé et dénoncé dans le Morvan après la création de la première usine Biosyl. Le directeur s’était alors engagé à revoir ses approvisionnements avant de se rétracter.
Grâce à vos dons, nous avons pu monter un dossier en justice qui est très bien engagé puisque le permis de construire sur la parcelle de Guéret est de plus en plus fragile. Le 11 mars 2024, suite à l’un de nos recours, un premier permis déposé sur la commune de Saint-Fiel a déjà été retiré par le maire, car il avait été délivré dans une zone naturelle et était donc manifestement illégal. Pour suivre cette campagne, c’est par ici et si vous voulez nous aider, vous pouvez signer et partager cette pétition.
Dans les prochaines semaines, nous allons rendre public d’autres actions en justice. Dont une qui risque de faire beaucoup de bruit.
Canopée passe un cap
Vous êtes nombreux à vouloir nous aider et c’est trop chouette ! La meilleure façon de nous soutenir est d’adhérer. Vous pouvez devenir adhérent dès 5 euros, car le prix ne doit pas être une barrière. Nous sommes déjà plus de 3000 et notre objectif est de passer à 10 000 adhérents. Vous avez jusqu’à lundi 20 mai au soir pour adhérer et ainsi pouvoir participer à notre Assemblée Générale prévue le 25 juin prochain.
Pour nous renforcer, nous lançons deux appels à candidature.
Le premier pour devenir correspondant local de Canopée. Les correspondants locaux sont des personnes ressources pour nous aider à documenter des cas locaux et, selon les compétences et sur la base d'un mandat précis, nous représenter dans des instances locales.
Nous n'envisageons pas la création de groupes locaux c'est pourquoi une bonne connaissance du tissu local des acteurs est un atout pour candidater et créer des synergies.
Le deuxième pour rejoindre le conseil scientifique de Canopée, un espace de débat et de production d'analyses vulgarisées permettant de faire une passerelle entre les travaux académiques des scientifiques et des questions soulevées par les politiques forestières, et plus généralement la société. Il sera présidé par une personnalité indépendante de l'association (que nous n’avons pas encore désignée).
Pour soutenir notre travail et notre indépendance ou encore nous aider dans nos actions en justice, vous pouvez faire un don ponctuel ou régulier (c’est défiscalisé à 66%). Restons forts, ensemble.
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