SOLITUDE
Ainsi, tout se passa très bien, sauf que, plus tard dans l'après-midi, je rentrai à la maison et dis à ma mère :
« J'me suis fait une copine. Elle s'appelle Françoise. On s'amusait bien mais chuis revenue parce que, depuis l'temps, j'avais peur que tu t'inquiètes.
- Ben oui, je m'inquiétais. T'étais passée où ? J't'ai cherchée. J'ai même vu une petite brune, dans son jardin, à l'angle de la rue de Paris. J'lui ai demandé si elle t'avait pas vue…
- J'étais dans les Castors. C'est toi qui m'avais dit.
- Ben oui mais t'aurais pu m'prévenir. J'me suis fait du souci. Enfin, c'est pas grave. Viens prendre ton goûter ! »
Le lendemain, Françoise vint sonner au portail pour m'emmener jouer avec elle mais ma mère refusa et la congédia.
« Pourquoi j'ai pas l'droit d'aller jouer ?
- T'as rien à faire dehors. C'est les enfants mal élevés qui passent leur temps à traîner dans la rue. La place d'un enfant est auprès de sa mère.
- Alors, à quoi ça sert que je sois allée me faire une copine si j'ai pas l'droit de jouer avec elle ?
- C'est pas en une après-midi que tu peux dire qu'une fille est ta copine. Il faut laisser passer du temps et, un jour, vous verrez si vous vous retrouvez et si vous avez de nouveau envie de jouer ensemble. »
Pourtant, le jour suivant, Françoise vint encore sonner au portail pour demander si je pouvais venir jouer avec elle. Rien de tel pour mettre ma mère en colère ! À tous les coups, ça allait me retomber dessus. Il avait suffit que ma mère m'eût lâchée un instant pour que je fusse allée m'aquoquiner avec une mauvaise fille qui passait son temps à traîner dans les rues. Si je ne voulais pas que mes journées à venir ne fussent maussades et pleines de gifles, j'avais intérêt à me détourner de cette Françoise, comme disait péjorativement ma mère. Et si je consentais à renier ma copine pour être agréable à ma mère ? Eh bien, j'allais passer toutes mes vacances à tourner en rond dans le jardin, à attendre ; pour, au final, m'entendre dire que je m'étais vaguement fait une copine dans Cesson mais que j'avais préféré rester à la maison parce que j'étais sauvage.
Oui, voilà comment ça fonctionnait, avec ma mère. Si je ne le comprenais pas bien quand j'avais cinq ans, à huit ans ça devenait parfaitement clair.
SEX AND DESTROY un nouveau son rock ?
2ème partie : LA PRINCESSE DANS LE DONJON
Chapitre 13 : L'épreuve de la séparation
section 3 sur 20