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Le 3 septembre 1939, il y a 73 ans, Pablo Neruda, poète et homme de courage, alors ambassadeur du Chili en France, fit venir 2 500 réfugiés républicains espagnols au Chili. Cet épisode de sa vie restera sa « Mission d’amour ». La guerre civile venait de déchirer ce peuple d’Espagne, diviser et séparer les familles. L'hiver 1939, 500 000 réfugiés espagnols franchirent la frontière du Perthus en Catalogne. Ces hommes, ces femmes et ces enfants, au coeur républicain, victimes du fascisme du dictateur Franco, la France de Daladier n’en voulait pas. Ils furent parqués sur les plages d’Argelès, du Barcarès, de Saint-Cyprien et le Vernet entre autres. Combien sont morts de faim,[...]Pablo Neruda fit affréter un ancien cargo céréalier qui servit auparavant au transport d’armes pour les Républicains espagnols. Il fit réaménager les cales en réfectoires, dortoirs et sanitaires. Le bateau « Le Winnipeg », chargé de 2500 réfugiés quitta le port de Bordeaux et accosta sur les quais du port de Valparaiso au Chili le 3 septembre 1939
MISSION D'AMOUR
Et je les mis sur mon bateau.
C'était en plein jour et la France
eut cette fois sa robe d'apparat
quotidienne,
il y avait
la clarté du vin et de l'air
dans sa tunique de déesse forestière.
Mon navire attendait avec
son nom lointain
« Winnipeg »
collé à la jetée du jardin embrasé,
aux vieux raisins obstinés de l'Europe.
Pourtant mes Espagnols ne venaient pas
de Versailles,
du bal argenté,
des tapis anciens, amarante,
des coupes qui trillent
avec le vin,
non, ils ne venaient pas de là,
non, ils ne venaient pas de là.
De plus loin,
des camps et des maisons d'arrêt,
des sables noirs
du Sahara,
des cachettes inclémentes
où ils gisaient
dans la faim et la nudité,
là vers
mon bateau clair,
vers mon navire à l'ancre, vers l'espoir
ils accoururent l'un après l'autre
à mon appel, de leurs prisons,
des forteresses
d'une France qui chancelait,
par ma bouche appelés
ils accoururent,
«Saavedra», dis-je, et je vis venir le maçon,
«Zuñiga» dis-je, et «Zuñiga» était présent,
«Roces», et Roces arriva avec son sourire sévère,
je criai «Alberti !», et la poésie accourut
avec ses mains de quartz.
Paysans, menuisiers.
pêcheurs,
tourneurs, mécaniciens,
potiers,
tanneurs :
comme il se peuplait le bateau
qui s'en allait vers ma patrie.
Je sentais dans mes doigts
les graines
de l'Espagne
que je rachetai, que je répandis
sur la mer, destinées
à la paix
des prairies.
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