Révolte pour exiger une Assemblée Constituante
Que se passe-t-il au Pérou ? Ce pays d’Amérique latine comptant 32 millions d’habitants, dont une forte proportion d’habitants #autochtones, est en pleine #révolte. Le Pérou, qui borde l’Océan Pacifique, a été marqué par d’importantes #violences-sociales depuis des décennies. Un conflit terrible entre #guérillas marxistes et forces #arméesgouvernementales a fait des dizaines de milliers de morts, dans la capitale comme au sein des populations rurales. Un président d’extrême droite, Fujimori, a établi un régime d’exception dans les années 1990 et liquidé des opposants. Il est aujourd’hui emprisonné pour crimes contre l’humanité. La #police est #militarisée et la classe politique est régulièrement mise en cause pour corruption.
Depuis le 7 décembre, un soulèvement est en cours au Pérou, en réaction à la destitution du président de gauche Pédro Castillo, élu en juillet 2021. #Métis, issu d’un milieu #pauvre et #rural, Castillo représente une #gauche-sociale mais #conservatrice sur le plan des mœurs, hostile notamment au droit à l’ #IVG et aux #LGBT. Il est par ailleurs lui aussi accusé de corruption. Ce président élu démocratiquement représentait néanmoins une rupture avec la droite #ultralibérale et #autoritaire, et un certain espoir pour les #travailleurs de la #terre et les minorités.
En 1 an et demi, Castillo n’a quasiment pas pu gouverner. Il voulait réformer la Justice et convoquer une Assemblée Constituante, comme il l’avait promis durant sa campagne. Mais à chaque fois, il s’est heurté aux députés, majoritairement de droite, qui ont bloqué ses projets et ont essayé de le destituer. Castillo a donc tenté le 7 décembre de dissoudre le Parlement et a décrété un couvre feu, le temps selon lui de mettre en place une Assemblée Constituante, avec 130 élus, dont 40% seraient issus des partis politiques, 30% seraient des candidats issus de la société civile, 26% des représentants des peuples autochtones et 4% des représentants des afro-péruviens. Un coup de force pour modifier la Constitution sans l’aval d’un Parlement hostile.
Voulait-il réellement changer le système, ou simplement instaurer un régime plus autoritaire à son profit, comme ont pu le faire ses prédécesseurs ? Nous ne le saurons pas, car il a été immédiatement destitué et enfermé dans une prison militaire, le Parlement l’accusant de «coup d’État» et de «rébellion», et imposant un nouveau gouvernement temporaire non élu.
Depuis, des affrontements ont éclaté entre manifestants réclamant la libération de Castillo et les milices d’extrême droite alliées à la police. Des manifestations massives ont lieu : les mouvements sociaux dénoncent un «putsch» et une «dictature parlementaire». Les syndicats et collectifs de gauche ne défendent pas tous Castillo, mais réclament une dissolution du Parlement, des élections anticipées et une assemblée constituante, avec le célèbre slogan «Que se vayan todos», «Qu’ils s’en aillent tous».
La tension monte, avec des émeutes régulières près du Parlement à Lima, la grande autoroute qui traverse le pays bloquée par des mineurs, et les travailleurs agricoles se déclarent en état «d’insurrection populaire face au coup d’État néofasciste». Les organisations autochtones de l’Amazonie péruvienne appellent à la mobilisation de tous les autochtones du pays en soutien au mouvement insurrectionnel. Deux adolescents tués par des tirs de grenades policières depuis des hélicoptères, des centaines de personnes ont été blessées et un état d’urgence est instauré.
La Présidente non élue, une ancienne ministre de l’ex président, Dina Boluarte, propose d’organiser des élections anticipées en… avril 2024. Face à la surdité d’un pouvoir aux ordres des riches, probablement appuyé par les puissances d’Occident, la rue péruvienne risquer de continuer de gronder.
Un article réalisé avec l’aide de Clément Renard.