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“Décarcérer. Cahez cette prison que je ne saurais voir” de Sylvain Lhuissier
«L’ #enfermement des corps est une #violence. Cette violence ne peut qu’engendrer de la fracture, là où il faudrait du lien et de la réparation. Nous ne pouvons que tendre vers un monde sans prison, en cherchant dans chaque situation, le chemin d’une moindre violence».
On vous conseille vivement de lire "Décarcérer. Cachez cette prison que je ne saurais voir" de Sylvain Lhuissier, aux éditions Rue de l’échiquier.
Résolument #anti-carcéral, l’ouvrage “Décarcérer” de Sylvain Lhuissier nous apporte des arguments concrets et documentés pour contrer et déconstruire les éléments de langage #réactionnaires et les fausses informations diffusées sur la prison en #fRance.
Reprenant point par point les arguments sécuritaires qui n’ont pour but que d’enfermer les classes populaires, les personnes étrangères, les toxicomanes et autres indésirables, l’auteur démontre statistiquement que la prison ne sert à rien. Ni en termes de réparation du préjudice pour les #victimes, ni pour la #prévention de la délinquance, ni en termes de #réinsertion et de lutte contre la récidive.
Car la vraie raison de l’existence de ces lieux d’emprisonnement indignes, qui deviennent des mouroirs, c’est qu’ils jouent un «formidable rôle d’exclusion et de ségrégation». Voilà le rôle effectif, beaucoup moins avouable mais réellement efficace, des prisons. Surveiller, punir et évincer de l’espace public certaines populations car «elle ne concerne qu’une classe sociale restreinte. On fraude et on triche dans tous les milieux, mais seule une partie d’entre nous est destinée à aller en prison». «C’est aussi pour ça que peu la connaissent» explique l’auteur, et que beaucoup la fantasment. Parfois à travers des médias ou des séries télé qui ne reflètent en rien la réalité carcérale mais alimentent, sous prétexte de faits divers macabres, l’argument principal des défenseurs ignorants de la prison : on ne peut pas laisser les criminels dehors !
La réalité c’est que seules 1,5% des personnes incarcérées sont des tueurs ou des violeurs. Les criminels ne représentent que 1,5% de la population carcérale. Voilà un chiffre qui démonte tous les discours mensongers sur le fait que la prison permet d’écarter les personnes réellement dangereuses de la société. Non, la majorité des prisonniers le sont, pour 26%, pour des faits de vol et de recel.
On savait déjà que seulement 0,6% des viols étaient condamnés. Les crimes policiers restent eux aussi impunis… Et si on entend encore trop souvent que la prison met en sécurité la reste de la population, on entend trop peu que la récidive concerne plus de la moitié des ex-taulards. Oui, 59% des personnes enfermées dans ces conditions inhumaines se feront arrêter à nouveau, en état de récidive.
«On ne peut pas construire notre politique pénale et carcérale sur 1,5% de faits divers, aussi atroces soient-ils».
L’auteur de “Décarcérer” déconstruit les idées reçues et revient sur le traitement inhumain des prisonnier-es, les conditions d’insalubrité, la surpopulation, l’isolement, la violence physique, morale et sociale qu’ils subissent. La rupture avec les proches, la perte d’emploi, de logement consécutive, les symptômes de stress post-traumatique qui s’installent parfois pour de longues années après la sortie.
Sylvain Lhuissier amène plus largement à se questionner sur notre société de contrôle, de surveillance et de domination, et appelle chacun-e à prendre ses responsabilités, en tant que magistrat-es, politiques ou médias. Car tous portent la responsabilité de participer et de diffuser l’idée que la prison est la seule possibilité.
Plus largement, nous portons toutes et tous la responsabilité de fermer les yeux sur ce qui se passe dans les lieux d’enfermement. Cela nous concerne, concerne la société dans laquelle nous voulons vivre : «Ne laissons plus passer les caricatures et les mensonges sur la prison. Osons nous demander ce qu’on attend de notre justice. Comment on voudrait qu’elle soit rendue». Car «légitimer la prison, c’est légitimer une forme de violence et de domination».
Comme le démontre Sylvain Lhuissier, les alternatives sont multiples, mais nécessitent une réelle volonté de mettre fin au système d’oppression et de domination que représente la société carcérale. Ainsi, il interroge la justice pénale au sens large en tant qu’institution centrale, au cœur de notre société, et nous invite à repenser celle-ci au regard de la justice sociale, de la défense de nos services publics, de l’accès aux soins, au logement, à l’éducation… plutôt que par la répression et l’enfermement inhumain.