Prévisions de croissance : où en est réellement l’économie française ? - Editos - Marianne TV
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Prévisions de croissance : où en est réellement l’économie française ?
20 septembre 2021
Pour Jean-Michel Quatrepoint, derrière des prévisions de croissance pour 2021 plutôt optimistes, la France est en voie de sous-développement…
Où en est réellement l’économie française ? À lire les commentaires de la presse, l’optimisme est de retour. L’Insee et la Banque de France révisent leurs prévisions de croissance pour 2021 : une augmentation de 6,3 % pour la Banque de France ! Loin de moi, l’envie de doucher cet enthousiasme, mais il faut pourtant remettre les choses à leur place et faire un peu d’arithmétique de base.
Si l’on prend le PIB de l’année 2019 comme une base 100, ce PIB a chuté en 2020 de 8 %. Il se retrouve donc à 92. Maintenant, si nous appliquons une hausse de 6,3 % sur 92, on se retrouve avec un indice à 97,8. C’est-à-dire qu’on n’a pas retrouvé le niveau de 2019. De plus, les prévisions pour 2022 sont moins optimistes : autour de 4 % de croissance. Résultat : ce n’est pas avant la fin de 2022, que l’on retrouvera le niveau de 2019. Et ce, malgré les tombereaux d’argent public injectés avec le « quoi qu’il en coûte ».
La triste réalité c’est que la crise du Covid a eu plus d’impact sur l’économie française que dans d’autres pays. Et ce, en raison du modèle de développement que les élites de notre pays ont choisi pour nous, il y a un quart de siècle. Un modèle qui faisait l’impasse sur l’industrie, sur la balance commerciale, en espérant compenser les déficits structurels du commerce extérieur par des excédents dans les services, le tourisme, et un grand secteur industriel, l’aéronautique avec Airbus.
Depuis 2003, la France a un déficit commercial gigantesque, quand on le compare – je ne parle même pas de l’Allemagne – mais avec l’Italie. Bon an, mal an, ce déficit était en partie gommé par les excédents des biens et services. C’est ce que les économistes appellent la balance des transactions courantes, qui est le vrai juge de paix de la situation économique d’un pays comparée à ses voisins et concurrents.
En 2019, cette balance des transactions courantes était en déficit d’un peu plus de 7 milliards d’euros. En 2020, c’est un cataclysme, le déficit explose à 43,7 milliards d’euros, et en 2021 on est parti pour atteindre encore un déficit d’une trentaine de milliards. Comment expliquer ce trou ? Eh bien, tout simplement par le modèle choisi il y a 25 ans. Avec la Covid, les recettes touristiques se sont effondrées, les exportations d’avions également. Du coup, le roi est nu ! Reste le déficit commercial pur, qui est devenu abyssal, car la France a perdu, au fil des ans, des parts de marché, notamment envers l’Italie. Et nous importons toujours plus de biens. Plus nous relançons la consommation, plus nous creusons le déficit !
En 2020, malgré la pandémie, l’Allemagne a engrangé 183 milliards d’excédents commerciaux et l’Italie 63 milliards. Nous, nous sommes les champions du déficit avec plus de 80 milliards ! Vous avez remarqué que l’on ne parle pas de ces chiffres, c’est comme s’ils n’existaient pas, et pourtant ce sont eux qui témoignent de l’échec de ce modèle choisi il y a vingt-cinq ans.
Notre pays est, en réalité, en voie de sous-développement et les Français sentent confusément ce déclassement, ce qui nourrit leur pessimisme et le déclinisme. Les industries, les usines, ont déserté les territoires. Et le comble ? Nous sommes des producteurs de matières premières – je pense au lin, au bois, mais aussi à la pomme de terre, au lait, à la betterave – nous exportons ces produits bruts et ils nous reviennent sous forme de produits à valeur ajoutée. Le lait de nos vaches est récolté avec des trayeuses étrangères. L’essentiel du matériel agricole est importé. Et tout est à l’avenant !
Pour réindustrialiser, la tâche est immense. Il faut d’abord identifier, poste par poste, produit par produit, là où sont nos principaux déficits commerciaux. Ensuite, il faut définir des priorités de reconquête. Enfin, il faut mettre en face des moyens financiers, mais aussi une volonté politique sans faille, pour vaincre les lourdeurs de notre bureaucratie, et surtout pour imposer, à Bruxelles et à nos partenaires européens qui sont nos concurrents, une stratégie volontariste de reconquête industrielle.
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