L'imposture #Friot : le #salaire à perpétuité
la condition d'existence du #capital, c'est le #salariat . Le salariat repose exclusivement sur la #concurrence des ouvriers entre eux.
K.Marx, Manifeste
On dit bien que le capital et le salariat ont les mĂȘmes intĂ©rĂȘts, mais cela n'a qu'un sens: le capital et le salariat sont les deux termes d'un seul et mĂȘme rapport [de production]._
K.Marx, Travail salarié et capital
"Je refuse d'ĂȘtre un improductif. J'entend bien contribuer Ă la production de valeur Ă©conomique jusqu'Ă ma mort", dit le sociologue.
Militant du #PCF depuis 1969 -soit 54 ans Ă manger son chapeau devant toutes les trahisons imaginables-, Il fonde en 2011 le "RĂ©seau Salariat", dont l'objectif dĂ©clarĂ©, sur leur site, est : "prolonger, diffuser une pensĂ©e rĂ©volutionnaire orientĂ©e vers lâappropriation collective des moyens de production [...] et lâoctroi Ă toutes et tous dâun salaire Ă vie." Cette phrase, seule, suffit Ă poser une large partie des confusions structurant sont discours, une redĂ©finition inĂ©dite du communisme : La production c'est le travail, la rĂ©volution c'est le salaire ; la libertĂ© c'est l'esclavage.
La revendication du #salaire_Ă _vie vise Ă pousser Ă son terme la logique de la marchandisation de la force de travail pour mieux la subvertir de lâintĂ©rieur. Tout en se rĂ©clamant de Marx et en lui empruntant une partie de son vocabulaire, Friot opĂšre une profonde torsion de ses concepts centraux, dĂ©laissant les autres et disloquant littĂ©ralement son analyse du capitalisme, sans jamais se rĂ©fĂ©rer ni aux dĂ©bats nombreux en la matiĂšre ni Ă aucun Ă©lĂ©ment empirique prĂ©cis. Cette opĂ©ration Ă©pargne Ă Friot toute proposition d'une vĂ©ritable Ă©laboration thĂ©orique : tablant sur une faible diffusion de cette culture Ă©conomique, prenant le relais de critiques antĂ©rieures du marxisme quâil ne cite pas, il peut par simple dĂ©cret sâautoriser Ă redĂ©finir le salariat comme forme Ă©mancipatrice et le communisme comme sa gĂ©nĂ©ralisation, nâanalysant jamais la sĂ©paration des producteurs et des moyens de production qui dĂ©finit la condition salariale. C'est surtout par ces qualitĂ©s d'orateurs, entretenues par un demi-siĂšcle de fĂȘtes de l'Huma, quâun tel Ă©difice tient debout dans la forme.
Le centre nĂ©vralgique de sa construction rĂ©side dans la proposition dâun salaire Ă vie -proposition aujourdâhui montante, sous des dĂ©nominations diverses, au point que ses nombreuses variantes se rĂ©partissent sur un arc qui va de lâanticapitalisme au libĂ©ralisme- La version prĂ©sentĂ©e par Friot est celle dâune rĂ©munĂ©ration dĂ©connectĂ©e de lâemploi, qui sâoppose selon lui Ă la proposition libĂ©rale de « revenu universel ». Ces salaires, dit-il, seront financĂ©s par une «caisse des salaires», qui sera alimentĂ©e par une cotisation prĂ©levĂ©e sur la valeur ajoutĂ©e de toutes les entreprises. Ce ne sont plus les entreprises qui payeront directement les salariĂ©s, mais toutes les entreprises payerons une caisse des salaires qui paye les employĂ©s. VoilĂ comment la redĂ©finition du concept de respiration est censĂ© Ă©viter la noyade.
Pas touche Ă l'Ă©conomie de marchĂ©, Ă la concurrence structurelle de l'Ă©conomie marchande, Ă lâextorsion de la plus-value ; mais comment sây prendra une entreprise pour dĂ©fendre sa compĂ©titivitĂ© sur le marchĂ© ? Elle ne paye pas les salaires, donc ne peut pas les diminuer. Il lui restera quelques options : allonger le temps de travail des salariĂ©s ou augmenter leur productivitĂ©. Nous voilĂ revenus Ă des mĂ©canismes bien connus, Ă l'organisation actuelle. Câest quâon a affaire Ă un systĂšme utopique, au sens dâune construction artificielle, arbitraire, que Friot a Ă©laborĂ© Ă la façon dont les socialistes utopiques, avant Marx, construisaient leurs phalanstĂšres et leurs communautĂ©s utopiques. Marx, justement, a permis de dĂ©passer ce socialisme utopique et de fonder un socialisme scientifique, dont le programme est Ă©laborĂ© en sâappuyant sur une analyse scientifique de la rĂ©alitĂ© Ă©conomique. La seule lutte des classes qui vaille, câest la lutte pour le salaire Ă vie et lâaugmentation du taux de cotisations. Tout le reste, câest du temps perdu. VoilĂ ce que Friot Ă©crit noir sur blanc, et câest franchement absurde.
(largement inspiré de cet article)
En mĂȘme temps, et tout Ă fait en dehors de lâasservissement gĂ©nĂ©ral quâimplique le rĂ©gime du salariat, les ouvriers ne doivent pas sâexagĂ©rer le rĂ©sultat final de cette lutte quotidienne. Ils ne doivent pas oublier quâils luttent contre les effets et non contre les causes de ces effets, quâils ne peuvent que retenir le mouvement descendant, mais non en changer la direction, quâils nâappliquent que des palliatifs, mais sans guĂ©rir le mal. Ils ne doivent donc pas se laisser absorber exclusivement par les escarmouches inĂ©vitables que font naĂźtre sans cesse les empiĂ©tements ininterrompus du capital ou les variations du marchĂ©. Il faut quâils comprennent que le rĂ©gime actuel, avec toutes les misĂšres dont il les accable, engendre en mĂȘme temps les conditions matĂ©rielles et les formes sociales nĂ©cessaires pour la transformation Ă©conomique de la sociĂ©tĂ©. Au lieu du mot dâordre conservateur: « Un salaire Ă©quitable pour une journĂ©e de travail Ă©quitable », ils doivent inscrire sur leur drapeau le mot dâordre rĂ©volutionnaire: « Abolition du salariat ».
Karl Marx, Travail salarié et capital
Or, si tous ces idĂ©ologues sont des partisans du travail â et pas seulement parce quâils comptent faire accomplir leur labeur par dâautres â, ils manifestent dâĂ©tranges rĂ©ticences Ă le dire. Ils peuvent pĂ©rorer sans fin sur les salaires, les horaires, les conditions de travail, lâexploitation, la productivitĂ©, la rentabilitĂ© ; ils sont disposĂ©s Ă parler de tout sauf du travail lui-mĂȘme. Ces experts, qui se proposent de penser Ă notre place, font rarement Ă©tat publiquement de leurs conclusions sur le travail, malgrĂ© son Ă©crasante importance dans nos vies. Les syndicats et les managers sont dâaccords pour dire que nous devrions vendre notre temps, nos vies en Ă©change de la survie, mĂȘme sâils en marchandent le prix. Les marxistes pensent que nous devrions ĂȘtre rĂ©gentĂ©s par des bureaucrates. Les libertariens estiment que nous devrions travailler sous lâautoritĂ© exclusive des hommes dâaffaires. Les fĂ©ministes nâont rien contre lâautoritĂ©, du moment quâelle est exercĂ©e par des femmes. Il est clair que ces marchands dâidĂ©ologies sont sĂ©rieusement divisĂ©s quant au partage de ce butin quâest le pouvoir. Il est non moins clair quâaucun dâeux ne voit la moindre objection au pouvoir en tant que tel et que tous veulent continuer Ă nous faire travailler.
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Seule une fraction (toujours plus rĂ©duite) des activitĂ©s salariĂ©es remplit des besoins rĂ©els - indĂ©pendants de la dĂ©fense ou de la reproduction du systĂšme salarial et de ses appendices politiques ou judiciaires. Il y a trente-cinq ans, Paul et Percival Goddman estimaient que seuls 5% du travail effectuĂ© alors â il est probable que ce chiffre, pour peu quâil soit fiable, serait plus bas de nos jours â auraient suffi Ă satisfaire nos besoins minimaux : alimentation, vĂȘtements, habitat. Leur estimation nâest quâune supposition Ă©clairĂ©e, mais la conclusion en est aisĂ©e Ă tirer : directement ou indirectement, le gros du travail ne sert que les desseins improductifs du commerce et du contrĂŽle social.
[âŠ]
Comme le travail ne prĂ©sente aucune nĂ©cessitĂ©, sauf pour ceux dont il renforce le pouvoir, des travailleurs toujours plus nombreux passent dâune activitĂ© relativement utile Ă une activitĂ© relativement inutile, dans le simple but dâassurer le maintien de lâordre, la paix sociale â car le travail est en soi la plus redoutable des polices. Nâimporte quoi vaut mieux que rien. VoilĂ pourquoi vous ne pouvez rentrer avant lâhoraire Ă la maison sous prĂ©texte que vous avez achevĂ© votre besogne quotidienne plus tĂŽt. MĂȘme sâils nâen ont aucun usage productif, les maĂźtres veulent votre temps, et en quantitĂ© suffisante pour que vous leur apparteniez corps et Ăąme.
Bob Black, LâAbolition du travail
Ainsi, tout les aliénés qui souhaitent se vendre librement, trouveront dans les thÚses de Friot un exutoire maximaliste : Vendre librement sa vie pour survivre, comme seul horizon.
Pour tout les autres :
Mort au travail, mort au salaire.