#socialisme

magdoz@diaspora.psyco.fr

Mélenchon dit ne pas aimer le #PS, #EELV, Les #Communistes #Roussel, mais fait une union avec eux pour gagner.

17/09/2023 https://yt.artemislena.eu/watch?v=9d85cNWzjVU&t=40min16s

Personnellement, je ne fais pas la #NUPES parce que j'aime les autres.
Non, je ne les aime pas.
-- une #écologie qui n'est pas anti-capitaliste, pour moi c'est du jardinage,
-- le #socialisme qui ne met pas en cause le #capitalisme, c'est mignon,
-- et le #communisme qui ne se donne pas comme objectif une révolution socialiste, je me demande ce que c'est.
Je suis #Insoumis et je sais pourquoi.

Voilà. C'est dit, et c'est plus que rassurant.
Maintenant, soit chacun fait bande à part et les droites gagneront encore, soit ...
#France #Politique #Gauche

d3@diaspora.psyco.fr

Mesdames, Messieurs, Jeunes élèves,

C’est une grande joie pour moi de me retrouver en ce lycée d’Albi et d’y reprendre un instant la parole. Grande joie nuancée d’un peu de mélancolie ; car lorsqu’on revient à de longs intervalles, on mesure soudain ce que l’insensible fuite des jours a ôté de nous pour le donner au passé. Le temps nous avait dérobés à nous-mêmes, parcelle à parcelle, et tout à coup c’est un gros bloc de notre vie que nous voyons loin de nous. La longue fourmilière des minutes emportant chacune un grain chemine silencieusement, et un beau soir le grenier est vide.

Mais qu’importe que le temps nous retire notre force peu à peu, s’il l’utilise obscurément pour des œuvres vastes en qui survit quelque chose de nous ? Il y a vingt-deux ans, c’est moi qui prononçais ici le discours d’usage. Je me souviens (et peut-être quelqu’un de mes collègues d’alors s’en souvient-il aussi) que j’avais choisi comme thème : les jugements humains. Je demandais à ceux qui m’écoutaient de juger les hommes avec bienveillance, c’est-à-dire avec équité, d’être attentifs, dans les consciences les plus médiocres et les existences les plus dénuées, aux traits de lumière, aux fugitives étincelles de beauté morale par où se révèle la vocation de grandeur de la nature humaine. Je les priais d’interpréter avec indulgence le tâtonnant effort de l’humanité incertaine.

Peut-être, dans les années de lutte qui ont suivi, ai-je manqué plus d’une fois envers des adversaires à ces conseils de généreuse équité. Ce qui me rassure un peu, c’est que j’imagine qu’on a dû y manquer aussi parfois à mon égard, et cela rétablit l’équilibre. Ce qui reste vrai, à travers toutes nos misères, à travers toutes les injustices commises ou subies, c’est qu’il faut faire un large crédit à la nature humaine ; c’est qu’on se condamne soi-même à ne pas comprendre l’humanité, si on n’a pas le sens de sa grandeur et le pressentiment de ses destinées incomparables.

Cette confiance n’est ni sotte, ni aveugle, ni frivole. Elle n’ignore pas les vices, les crimes, les erreurs, les préjugés, les égoïsmes de tout ordre, égoïsme des individus, égoïsme des castes, égoïsme des partis, égoïsme des classes, qui appesantissent la marche de l’homme, et absorbent souvent le cours du fleuve en un tourbillon trouble et sanglant. Elle sait que les forces bonnes, les forces de sagesse, de lumière, de justice, ne peuvent se passer du secours du temps, et que la nuit de la servitude et de l’ignorance n’est pas dissipée par une illumination soudaine et totale, mais atténuée seulement par une lente série d’aurores incertaines.

Oui, les hommes qui ont confiance en l’homme savent cela. Ils sont résignés d’avance à ne voir qu’une réalisation incomplète de leur vaste idéal, qui lui-même sera dépassé ; ou plutôt ils se félicitent que toutes les possibilités humaines ne se manifestent point dans les limites étroites de leur vie. Ils sont pleins d’une sympathie déférente et douloureuse pour ceux qui ayant été brutalisés par l’expérience immédiate ont conçu des pensées amères, pour ceux dont la vie a coïncidé avec des époques de servitude, d’abaissement et de réaction, et qui, sous le noir nuage immobile, ont pu croire que le jour ne se lèverait plus. Mais eux-mêmes se gardent bien d’inscrire définitivement au passif de l’humanité qui dure les mécomptes des générations qui passent. Et ils affirment, avec une certitude qui ne fléchit pas, qu’il vaut la peine de penser et d’agir, que l’effort humain vers la clarté et le droit n’est jamais perdu. L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir.

Dans notre France moderne, qu’est-ce donc que la République ? C’est un grand acte de confiance. Instituer la République, c’est proclamer que des millions d’hommes sauront tracer eux-mêmes la règle commune de leur action ; qu’ils sauront concilier la liberté et la loi, le mouvement et l’ordre ; qu’ils sauront se combattre sans se déchirer ; que leurs divisions n’iront pas jusqu’à une fureur chronique de guerre civile, et qu’ils ne chercheront jamais dans une dictature même passagère une trêve funeste et un lâche repos. Instituer la République, c’est proclamer que les citoyens des grandes nations modernes, obligés de suffire par un travail constant aux nécessités de la vie privée et domestique, auront cependant assez de temps et de liberté d’esprit pour s’occuper de la chose commune. Et si cette République surgit dans un monde monarchique encore, c’est assurer qu’elle s’adaptera aux conditions compliquées de la vie internationale sans rien entreprendre sur l’évolution plus lente des peuples, mais sans rien abandonner de sa fierté juste et sans atténuer l’éclat de son principe.

Oui, la République est un grand acte de confiance et un grand acte d’audace. L’intervention en était si audacieuse, si paradoxale, que même les hommes hardis qui il y a cent dix ans, ont révolutionné le monde, en écartèrent d’abord l’idée. Les Constituants de 1789 et de 1791, même les Législateurs de 1972 croyaient que la monarchie traditionnelle était l’enveloppe nécessaire de la société nouvelle. Ils ne renoncèrent à cet abri que sous les coups répétés de la trahison royale. Et quand enfin ils eurent déraciné la royauté, la République leur apparut moins comme un système prédestiné que comme le seul moyen de combler le vide laissé par la monarchie. Bientôt cependant, et après quelques heures d’étonnement et presque d’inquiétude, ils l’adoptèrent de toute leur pensée et de tout leur cœur. Ils résumèrent, ils confondirent en elle toute la Révolution. Et ils ne cherchèrent point à se donner le change. Ils ne cherchèrent point à se rassurer par l’exemple des républiques antiques ou des républiques helvétiques et italiennes. Ils virent bien qu’ils créaient une œuvre nouvelle, audacieuse et sans précédent. Ce n’était point l’oligarchique liberté des républiques de la Grèce, morcelées, minuscules et appuyées sur le travail servile. Ce n’était point le privilège superbe de la république romaine, haute citadelle d’où une aristocratie conquérante dominait le monde, communiquant avec lui par une hiérarchie de droits incomplets et décroissants qui descendait jusqu’au néant du droit, par un escalier aux marches toujours plus dégradées et plus sombres, qui se perdait enfin dans l’abjection de l’esclavage, limite obscure de la vie touchant à la nuit souterraine. Ce n’était pas le patriciat marchand de Venise et de Gênes. Non, c’était la République d’un grand peuple où il n’y avait que des citoyens et où tous les citoyens étaient égaux. C’était la République de la démocratie et du suffrage universel. C’était une nouveauté magnifique et émouvante.

Les hommes de la Révolution en avaient conscience. Et lorsque dans la fête du 10 août 1793, ils célébrèrent cette Constitution, qui pour la première fois depuis l’origine de l’histoire organisait dans la souveraineté nationale la souveraineté de tous, lorsque artisans et ouvriers, forgerons, menuisiers, travailleurs des champs défilèrent dans le cortège, mêlés aux magistrats du peuple et ayant pour enseignes leurs outils, le président de la Convention put dire que c’était un jour qui ne ressemblait à aucun autre jour, le plus beau jour depuis que le soleil était suspendu dans l’immensité de l’espace ! Toutes les volontés se haussaient, pour être à la mesure de cette nouveauté héroïque. C’est pour elle que ces hommes combattirent et moururent. C’est en son nom qu’ils refoulèrent les rois de l’Europe. C’est en son nom qu’ils se décimèrent. Et ils concentrèrent en elle une vie si ardente et si terrible, ils produisirent par elle tant d’actes et tant de pensées qu’on put croire que cette République toute neuve, sans modèles comme sans traditions, avait acquis en quelques années la force et la substance des siècles.

Et pourtant que de vicissitudes et d’épreuves avant que cette République que les hommes de la Révolution avaient crue impérissable soit fondée enfin sur notre sol ! Non seulement après quelques années d’orage elle est vaincue, mais il semble qu’elle s’efface à jamais de l’histoire et de la mémoire même des hommes. Elle est bafouée, outragée ; plus que cela, elle est oubliée. Pendant un demi-siècle, sauf quelques cœurs profonds qui garderaient le souvenir et l’espérance, les hommes la renient ou même l’ignorent. Les tenants de l’Ancien régime ne parlent d’elle que pour en faire honte à la Révolution : “ Voilà où a conduit le délire révolutionnaire ! ” Et parmi ceux qui font profession de défendre le monde moderne, de continuer la tradition de la Révolution, la plupart désavouent la République et la démocratie. On dirait qu’ils ne se souviennent même plus. Guizot s’écrie : “ Le suffrage universel n’aura jamais son jour ”. Comme s’il n’avait pas eu déjà ses grands jours d’histoire, comme si la Convention n’était pas sortie de lui. Thiers, quand il raconte la Révolution du10 août, néglige de dire qu’elle proclama le suffrage universel, comme si c’était là un accident sans importance et une bizarrerie d’un jour. République, suffrage universel, démocratie, ce fut, à en croire les sages, le songe fiévreux des hommes de la Révolution. Leur œuvre est restée, mais leur fièvre est éteinte et le monde moderne qu’ils ont fondé, s’il est tenu de continuer leur œuvre, n’est pas tenu de continuer leur délire. Et la brusque résurrection de la République, reparaissant en 1848 pour s’évanouir en 1851, semblait en effet la brève rechute dans un cauchemar bientôt dissipé.

Et voici maintenant que cette République, qui dépassait de si haut l’expérience séculaire des hommes et le niveau commun de la pensée que, quand elle tomba, ses ruines mêmes périrent et son souvenir s’effrita, voici que cette République de démocratie, de suffrage universel et d’universelle dignité humaine, qui n’avait pas eu de modèle et qui semblait destinée à n’avoir pas de lendemain, est devenue la loi durable de la nation, la forme définitive de la vie française, le type vers lequel évoluent lentement toutes les démocraties du monde.

Or, et c’est là surtout ce que je signale à vos esprits, l’audace même de la tentative a contribué au succès. L’idée d’un grand peuple se gouvernant lui-même était si noble qu’aux heures de difficulté et de crise elle s’offrait à la conscience de la nation. Une première fois en 1793 le peuple de France avait gravi cette cime, et il y avait goûté un si haut orgueil, que toujours sous l’apparent oubli et l’apparente indifférence, le besoin subsistait de retrouver cette émotion extraordinaire. Ce qui faisait la force invincible de la République, c’est qu’elle n’apparaissait pas seulement de période en période, dans le désastre ou le désarroi des autres régimes, comme l’expédient nécessaire et la solution forcée. Elle était une consolation et une fierté. Elle seule avait assez de noblesse morale pour donner à la nation la force d’oublier les mécomptes et de dominer les désastres. C’est pourquoi elle devait avoir le dernier mot. Nombreux sont les glissements et nombreuses les chutes sur les escarpements qui mènent aux cimes ; mais les sommets ont une force attirante. La République a vaincu parce qu’elle est dans la direction des hauteurs, et que l’homme ne peut s’élever sans monter vers elle. La loi de la pesanteur n’agit pas souverainement sur les sociétés humaines, et ce n’est pas dans les lieux bas qu’elles trouvent leur équilibre. Ceux qui, depuis un siècle, ont mis très haut leur idéal ont été justifiés par l’histoire.

Et ceux-là aussi seront justifiés qui le placent plus haut encore. Car le prolétariat dans son ensemble commence à affirmer que ce n’est pas seulement dans les relations politiques des hommes, c’est aussi dans leurs relations économiques et sociales qu’il faut faire entrer la liberté vraie, l’égalité, la justice. Ce n’est pas seulement la cité, c’est l’atelier, c’est le travail, c’est la production, c’est la propriété qu’il veut organiser selon le type républicain. À un système qui divise et qui opprime, il entend substituer une vaste coopération sociale où tous les travailleurs de tout ordre, travailleurs de la main et travailleurs du cerveau, sous la direction de chefs librement élus par eux, administreront la production enfin organisée.

Messieurs, je n’oublie pas que j’ai seul la parole ici et que ce privilège m’impose beaucoup de réserve. Je n’en abuserai point pour dresser dans cette fête une idée autour de laquelle se livrent et se livreront encore d’âpres combats. Mais comment m’était-il possible de parler devant cette jeunesse qui est l’avenir, sans laisser échapper ma pensée d’avenir ? Je vous aurais offensés par trop de prudence ; car quel que soit votre sentiment sur le fond des choses, vous êtes tous des esprits trop libres pour me faire grief d’avoir affirmé ici cette haute espérance socialiste qui est la lumière de ma vie.

Je veux seulement dire deux choses, parce quelles touchent non au fond du problème, mais à la méthode de l’esprit et à la conduite de la pensée. D’abord, envers une idée audacieuse qui doit ébranler tant d’intérêts et tant d’habitudes et qui prétend renouveler le fond même de la vie, vous avez le droit d’être exigeants. Vous avez le droit de lui demander de faire ses preuves, c’est-à-dire d’établir avec précision comment elle se rattache à toute l’évolution politique et sociale, et comment elle peut s’y insérer. Vous avez le droit de lui demander par quelle série de formes juridiques et économiques elle assurera le passage de l’ordre existant à l’ordre nouveau. Vous avez le droit d’exiger d’elle que les premières applications qui en peuvent être faites ajoutent à la vitalité économique et morale de la nation. Et il faut qu’elle prouve, en se montrant capable de défendre ce qu’il y a déjà de noble et de bon dans le patrimoine humain, qu’elle ne vient pas le gaspiller, mais l’agrandir. Elle aurait bien peu de foi en elle-même si elle n’acceptait pas ces conditions.

En revanche, vous, vous lui devez de l’étudier d’un esprit libre, qui ne se laisse troubler par aucun intérêt de classe. Vous lui devez de ne pas lui opposer ces railleries frivoles, ces affolements aveugles ou prémédités et ce parti pris de négation ironique ou brutale que si souvent, depuis un siècle même, les sages opposèrent à la République, maintenant acceptée de tous, au moins en sa forme. Et si vous êtes tentés de dire encore qu’il ne faut pas s’attarder à examiner ou à discuter des songes, regardez en un de vos faubourgs ? Que de railleries, que de prophéties sinistres sur l’œuvre qui est là ! Que de lugubres pronostics opposés aux ouvriers qui prétendaient se diriger eux-mêmes, essayer dans une grande industrie la forme de la propriété collective et la vertu de la libre discipline ! L’œuvre a duré pourtant ; elle a grandi : elle permet d’entrevoir ce que peut donner la coopération collectiviste. Humble bourgeon à coup sûr, mais qui atteste le travail de la sève, la lente montée des idées nouvelles, la puissance de transformation de la vie. Rien n’est plus menteur que le vieil adage pessimiste et réactionnaire de l’Ecclésiaste désabusé : “ Il n’y rien de nouveau sous le soleil ”. Le soleil lui-même a été jadis une nouveauté, et la terre fut une nouveauté, et l’homme fut une nouveauté. L’histoire humaine n’est qu’un effort incessant d’invention, et la perpétuelle évolution est une perpétuelle création.

C’est donc d’un esprit libre aussi que vous accueillerez cette autre grande nouveauté qui s’annonce par des symptômes multipliés : la paix durable entre les nations, la paix définitive. Il ne s’agit point de déshonorer la guerre dans le passé. Elle a été une partie de la grande action humaine, et l’homme l’a ennoblie par la pensée et le courage, par l’héroïsme exalté, par le magnanime mépris de la mort. Elle a été sans doute et longtemps, dans le chaos de l’humanité désordonnée et saturée d’instincts brutaux, le seul moyen de résoudre les conflits ; elle a été aussi la dure force qui, en mettant aux prises les tribus, les peuples, les races, a mêlé les élément humains et préparé les groupements vastes. Mais un jour vient, et tout nous signifie qu’il est proche, où l’humanité est assez organisée, assez maîtresse d’elle-même pour pouvoir résoudre, par la raison, la négociation et le droit, les conflits de ses groupements et de ses forces. Et la guerre, détestable et grande tant qu’elle est nécessaire, est atroce et scélérate quand elle commence à paraître inutile.

Je ne vous propose pas un rêve idyllique et vain. Trop longtemps les idées de paix et d’unité humaines n’ont été qu’une haute clarté illusoire qui éclairait ironiquement les tueries continuées. Vous souvenez-vous de l’admirable tableau que vous a laissé Virgile de la chute de Troie ? C’est la nuit : la cité surprise est envahie par le fer et le feu, par le meurtre, l’incendie et le désespoir. Le palais de Priam est forcé et les portes abattues laissent apparaître la longue suite des appartements et des galeries. De chambre en chambre, les torches et les glaives poursuivent les vaincus ; enfants, femmes, vieillards se réfugient en vain auprès de l’autel domestique que le laurier sacré ne protège pas contre la mort et contre l’outrage ; le sang coule à flots, et toutes les bouches crient de terreur, de douleur, d’insulte et de haine. Mais par dessus la demeure bouleversée et hurlante, les cours intérieures, les toits effondrés laissent apercevoir le grand ciel serein et paisible et toute la clameur humaine de violence et d’agonie monte vers les étoiles d’or : Ferit aurea sidera clamor.

De même, depuis vingt siècles et de période en période, toutes les fois qu’une étoile d’unité et de paix s’est levée sur les hommes, la terre déchirée et sombre a répondu par des clameurs de guerre.

C’était d’abord l’astre impérieux de la Rome conquérante qui croyait avoir absorbé tous les conflits dans le rayonnement universel de sa force. L’empire s’effondre sous le choc des barbares, et un effroyable tumulte répond à la prétention superbe de la paix romaine. Puis ce fut l’étoile chrétienne qui enveloppa la terre d’une lueur de tendresse et d’une promesse de paix. Mais atténuée et douce aux horizons galiléens, elle se leva dominatrice et âpre sur l’Europe féodale. La prétention de la papauté à apaiser le monde sous sa loi et au nom de l’unité catholique ne fit qu’ajouter aux troubles et aux conflits de l’humanité misérable. Les convulsions et les meurtres du Moyen Âge, les chocs sanglants des nations modernes, furent la dérisoire réplique à la grande promesse de paix chrétienne. La Révolution à son tour lève un haut signal de paix universelle par l’universelle liberté. Et voilà que de la lutte même de la Révolution contre les forces du vieux monde, se développent des guerres formidables.

Quoi donc ? La paix nous fuira-t-elle toujours ? Et la clameur des hommes, toujours forcenés et toujours déçus, continuera-t-elle à monter vers les étoiles d’or, des capitales modernes incendiées par les obus, comme de l’antique palais de Priam incendié par les torches ? Non ! Non ! Et malgré les conseils de prudence que nous donnent ces grandioses déceptions, j’ose dire, avec des millions d’hommes, que maintenant la grande paix humaine est possible, et si nous le voulons, elle est prochaine. Des forces neuves y travaillent : la démocratie, la science méthodique, l’universel prolétariat solidaire. La guerre devient plus difficile, parce qu’avec les gouvernements libres des démocraties modernes, elle devient à la fois le péril de tous par le service universel, le crime de tous par le suffrage universel. La guerre devient plus difficile parce que la science enveloppe tous les peuples dans un réseau multiplié, dans un tissu plus serré tous les jours de relations, d’échanges, de conventions ; et si le premier effet des découvertes qui abolissent les distances est parfois d’aggraver les froissements, elles créent à la longue une solidarité, une familiarité humaine qui font de la guerre un attentat monstrueux et une sorte de suicide collectif.

Enfin, le commun idéal qui exalte et unit les prolétaires de tous les pays les rend plus réfractaires tous les jours à l’ivresse guerrière, aux haines et aux rivalités de nations et de races. Oui, comme l’histoire a donné le dernier mot à la République si souvent bafouée et piétinée, elle donnera le dernier mot à la paix, si souvent raillée par les hommes et les choses, si souvent piétinée par la fureur des événements et des passions. Je ne vous dis pas : c’est une certitude toute faite. Il n’y a pas de certitude toute faite en histoire. Je sais combien sont nombreux encore aux jointures des nations les points malades d’où peut naître soudain une passagère inflammation générale. Mais je sais aussi qu’il y a vers la paix des tendances si fortes, si profondes, si essentielles, qu’il dépend de vous, par une volonté consciente, délibérée, infatigable, de systématiser ces tendances et de réaliser enfin le paradoxe de la grande paix humaine, comme vos pères ont réalisé le paradoxe de la grande liberté républicaine. Œuvre difficile, mais non plus œuvre impossible. Apaisement des préjugés et des haines, alliances et fédérations toujours plus vastes, conventions internationales d’ordre économique et social, arbitrage international et désarmement simultané, union des hommes dans le travail et dans la lumière : ce sera, jeunes gens, le plus haut effort et la plus haute gloire de la génération qui se lève.

Non, je ne vous propose pas un rêve décevant ; je ne vous propose pas non plus un rêve affaiblissant. Que nul de vous ne croit que dans la période encore difficile et incertaine qui précédera l’accord définitif des nations, nous voulons remettre au hasard de nos espérances la moindre parcelle de la sécurité, de la dignité, de la fierté de la France. Contre toute menace et toute humiliation, il faudrait la défendre : elle est deux fois sacrée pour nous, parce qu’elle est la France, et parce qu’elle est humaine

Même l’accord des nations dans la paix définitive n’effacera pas les patries, qui garderont leur profonde originalité historique, leur fonction propre dans l’œuvre commune de l’humanité réconciliée. Et si nous ne voulons pas attendre, pour fermer le livre de la guerre, que la force ait redressé toutes les iniquités commises par la force, si nous ne concevons pas les réparations comme des revanches, nous savons bien que l’Europe, pénétrée enfin de la vertu de la démocratie et de l’esprit de paix, saura trouver les formules de conciliation qui libéreront tous les vaincus des servitudes et des douleurs qui s’attachent à la conquête. Mais d’abord, mais avant tout, il faut rompre le cercle de fatalité, le cercle de fer, le cercle de haine où les revendications même justes provoquent des représailles qui se flattent de l’être, où la guerre tourne après la guerre en un mouvement sans issue et sans fin, où le droit et la violence, sous la même livrée sanglante, ne se discernent presque plus l’un de l’autre, et où l’humanité déchirée pleure de la victoire de la justice presque autant que de sa défaite.

Surtout, qu’on ne nous accuse point d’abaisser et d’énerver les courages. L’humanité est maudite, si pour faire preuve de courage elle est condamnée à tuer éternellement. Le courage, aujourd’hui, ce n’est pas de maintenir sur le monde la sombre nuée de la Guerre, nuée terrible, mais dormante, dont on peut toujours se flatter qu’elle éclatera sur d’autres. Le courage, ce n’est pas de laisser aux mains de la force la solution des conflits que la raison peut résoudre ; car le courage est l’exaltation de l’homme, et ceci en est l’abdication. Le courage pour vous tous, courage de toutes les heures, c’est de supporter sans fléchir les épreuves de tout ordre, physiques et morales, que prodigue la vie. Le courage, c’est de ne pas livrer sa volonté au hasard des impressions et des forces ; c’est de garder dans les lassitudes inévitables l’habitude du travail et de l’action. Le courage dans le désordre infini de la vie qui nous sollicite de toutes parts, c’est de choisir un métier et de le bien faire, quel qu’il soit ; c’est de ne pas se rebuter du détail minutieux ou monotone ; c’est de devenir, autant que l’on peut, un technicien accompli ; c’est d’accepter et de comprendre cette loi de la spécialisation du travail qui est la condition de l’action utile, et cependant de ménager à son regard, à son esprit, quelques échappées vers le vaste monde et des perspectives plus étendues. Le courage, c’est d’être tout ensemble, et quel que soit le métier, un praticien et un philosophe. Le courage, c’est de comprendre sa propre vie, de la préciser, de l’approfondir, de l’établir et de la coordonner cependant à la vie générale. Le courage, c’est de surveiller exactement sa machine à filer ou à tisser, pour qu’aucun fil ne se casse, et de préparer cependant un ordre social plus vaste et plus fraternel où la machine sera la servante commune des travailleurs libérés. Le courage, c’est d’accepter les conditions nouvelles que la vie fait à la science et à l’art, d’accueillir, d’explorer la complexité presque infinie des faits et des détails, et cependant d’éclairer cette réalité énorme et confuse par des idées générales, de l’organiser et de la soulever par la beauté sacrée des formes et des rythmes. Le courage, c’est de dominer ses propres fautes, d’en souffrir mais de n’en pas être accablé et de continuer son chemin. Le courage, c’est d’aimer la vie et de regarder la mort d’un regard tranquille ; c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel ; c’est d’agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense. Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques.

Ah ! vraiment, comme notre conception de la vie est pauvre, comme notre science de vivre est courte, si nous croyons que, la guerre abolie, les occasions manqueront aux hommes d’exercer et d’éprouver leur courage, et qu’il faut prolonger les roulements de tambour qui dans les lycées du premier Empire faisaient sauter les cœurs ! Ils sonnaient alors un son héroïque ; dans notre vingtième siècle, ils sonneraient creux. Et vous, jeunes gens, vous voulez que votre vie soit vivante, sincère et pleine. C’est pourquoi je vous ai dit, comme à des hommes, quelques-unes des choses que je portais en moi.

Discours à la jeunesse, Jean Jaurès, Lycée d'Albi, 30 juillet 1903

#Jaurès #discours #socialisme #république #démocratie #internationalisme #histoire

paco146@diaspora.psyco.fr

Chili, par la raison ou par la force

Le rejet du projet d'une nouvelle Constitution par le peuple chilien en 2022 a fait resurgir les conflits qui traversent le pays depuis cinq décennies. Du socialisme d'Allende au fascisme de Pinochet, cette fresque historique revient sur les origines de la fracture.

Le 11 septembre 1973, le général Pinochet mettait un terme dans un bain de sang à la révolution socialiste initiée par le président Salvador Allende trois ans plus tôt.
#docu #Arte #Chili #Allende #socialisme #Pinochet #fascisme #néolibéralisme #répression #torture #paupérisation

dudababel@diaspora-fr.org

Abdullah Öcalan

Connu sous le surnom d'Apo («oncle» en kurde), il onde en 1978 le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), sur la base d'un programme revendiquant un Kurdistan unifié, indépendant et socialiste. Au cours des années 1990, il abandonne ses revendications maximalistes, donnant désormais la priorité à une solution politique, pacifique et démocratique à la question kurde.

Öcalan est arrêté le 15 février 1999 et emprisonné en Turquie, où il est condamné à la peine de mort pour terrorisme. La sentence n'est cependant pas mise à exécution, le pays abolissant la peine capitale en 2002. Sa peine est alors commuée en prison en vie ; il est détenu sur l'île d'İmralı. En 2008, ses avocats et Amnesty International dénoncent des tortures à son encontre par les gardiens.

Théorisant une société fédéraliste et communaliste en dehors des structures étatiques, où démocratie directe, écologisme et féminisme sont liés. Elle est mise en pratique, depuis la guerre civile syrienne, au Rojava, région kurde autonome de la Syrie.

Ses textes traduits en francais :

#anarchie #anarchisme #kurdistan #rojava #autonome #ocalan #socialiste #socialisme #turquie #syrie #iraq #iran #pkk #démocratie #torture #prison #fédéralisme #communalisme #communisme #communiste #politique #hiérarchie #maximalisme #feminisme #féminisme #feministe #féministe

wazoox@diasp.eu

David Harvey : « En France, le néolibéralisme devient violent et autocratique » | Mediapart

#politique #marxisme #socialisme

David Harvey est une des figures les plus importantes du marxisme contemporain. De passage à Paris, il a rencontré Jean-Luc Mélenchon le 12 avril, à l’invitation de l’Institut La Boétie. Grand critique du capitalisme, inlassable porteur de la pensée de Karl Marx, géographe penseur des effets concrets du capital sur l’espace, ce Britannique de 88 ans est un observateur toujours affûté de la réalité économique, sociale et géographique.

En marge de cette rencontre et d’une série d’autres interventions en France, David Harvey a accepté de répondre aux questions de Mediapart à propos de l’état actuel du capitalisme, de sa relation avec l’ancien candidat de La France insoumise (LFI) à la présidentielle, et de Marx.

Illustration 1
David Harvey à Paris, en avril 2023.

Mediapart : Votre réflexion sur le capitalisme comporte une importante théorie des crises. Depuis 2020, une nouvelle crise semble s’être ouverte, qui vient de connaître avec la crise bancaire un nouvel épisode. Quel est votre sentiment sur l’état actuel du capitalisme ?

David Harvey : Je voudrais isoler quelques faits pour répondre à cette question. Le premier, c’est qu’il est très difficile de se représenter aujourd’hui ce que pourrait être le futur du capitalisme parce que la direction que prendra la Chine, qui est un acteur crucial, n’est pas claire.

Ma vision est que la Chine a permis au capitalisme, en 2007-2008, d’éviter une dépression comparable à celle des années 1930. Depuis ce moment et avant l’arrivée du Covid, la Chine a représenté environ un tiers de la croissance mondiale, ce qui est davantage que les États-Unis et l’Europe réunis. Donc il est impossible, dans les circonstances présentes, de prévoir la direction que prendra le capitalisme sans savoir celle que prendra la Chine.

Le deuxième élément qui me semble important est que, à l’intérieur du monde capitaliste, il y a eu de sérieux crashs financiers depuis 1980. À chaque crise, les banques centrales ont répondu en augmentant la liquidité. À présent, nous nous dirigeons vers la prochaine crise qui nécessitera encore plus de liquidités. Pour moi, nous sommes donc dans une situation dangereuse où le capital s’accumule sous l’effet de ces infusions de liquidités.

Tout cela ressemble à une chaîne de Ponzi mondiale [un montage financier frauduleux – ndlr] et les chaînes de Ponzi finissent souvent très mal. La difficulté dans ce cas, c’est qu’il n’existe pas de possibilité pour les États de permettre une crise financière si la finance occidentale est fondée sur une chaîne de Ponzi… Mais alors, la question est de savoir s’ils peuvent contenir cette crise et je ne suis pas sûr qu’ils le peuvent.

Le troisième élément qui est important pour moi est la question des transferts de technologie sur le plan international. Depuis les années 1950, les États-Unis n’ont pas freiné, et parfois même ont promu, les transferts de technologie vers le Japon, Taïwan ou la Corée du Sud. En faisant cela, ils cherchaient évidemment à contenir la Chine dans sa forme communiste et à l’encercler par un réseau de pays à revenus moyens à élevés.

Que s’est-il passé lorsque la Chine s’est ouverte ? Les capitaux du Japon, de la Corée du Sud ou de Taïwan se sont massivement investis en Chine, amenant avec eux les transferts de technologie passés. À présent, les États-Unis tentent de bloquer les transferts de technologie vers la Chine, ce qui à mon sens est une attitude stupide. En partie parce que c’est impossible, mais aussi parce que si l’on bloque le développement de la Chine, qui a systématiquement sauvé le capitalisme, on ne fait pas quelque chose de très positif pour le capitalisme.

Il y a beaucoup de divergences d’opinion aux États-Unis, mais s’il est une chose sur laquelle le Congrès est unifié avec la présidence Biden, c’est bien sa politique anti-chinoise. Si cette politique réussit, nous verrons, je pense, le monde tomber dans une croissance négative. Et cela conduira à de nombreuses oppositions, à des mécontentements, à de l’agitation et à des soulèvements. Nous voyons déjà beaucoup de ces événements se dérouler sous nos yeux.

Ces trois éléments apparaissent effectivement comme des contradictions majeures du capitalisme contemporain. Dans votre œuvre, vous insistez sur le caractère endémique des contradictions, et donc des crises, dans le capitalisme. Selon vous, ces crises prennent toujours la forme de violents processus de dévaluation ou de dévalorisation du capital. Avec cette forte intervention de l’État, on a le sentiment que ce processus est bloqué. Qu’en pensez-vous ?

Non, en réalité, ce processus de dévaluation est déjà en cours. Il y a en permanence des dévaluations. Mais la vraie question est : qui va être dévalorisé ? En 2007-2008 aux États-Unis, sept millions de ménages ont perdu leur maison. Ils ont perdu 80 % de leur patrimoine dans la grande perte de valeur de leur demeure, principalement dans la communauté afro-américaine. En parallèle, les banques ont été renflouées. Il y a eu un transfert massif de droits de propriété vers les banques, avec des expulsions.

Ensuite, ces droits ont été vendus à prix bas, grâce au renflouement des banques, vers des entreprises comme Blackstone. Blackstone est à présent le principal propriétaire dans le monde. La perte de valeur des populations aux États-Unis s’est donc retrouvée dans la poche de Blackstone. Stephen Schwarzman, qui dirige cette entreprise, est maintenant un des principaux milliardaires de la planète. Et il a été l’un des principaux soutiens de Donald Trump.

Vous avez donc le choix : on peut renflouer les banques ou les gens. Et depuis les années 1970, le choix des gouvernements a toujours été de renflouer les banques. Ce que l’on voit, ce sont donc bien des dévalorisations des actifs et des économies des gens.

Et aujourd’hui ?

Aujourd’hui, je vois d’autres processus importants de dévaluation. Par exemple, on ne sait pas exactement combien de personnes ont perdu de l’argent dans la crise des cybermonnaies. Mais les investisseurs personnels pourraient avoir perdu jusqu’à 40 milliards de dollars. Beaucoup de gens riches, comme des sportifs, ont incité des gens à aller investir dans ces actifs en leur garantissant des rentabilités importantes. Et ces gens ont mis leur monnaie dans ces cybermonnaies. Maintenant, le marché s’est effondré et ils ont perdu.

Une concentration croissante de la richesse augmente la centralisation du capital, autour de sociétés comme Blackstone ou BlackRock.

David Harvey

En Chine, il se passe quelque chose de similaire avec la crise du développement immobilier. Xi Jinping a dit que l’immobilier était pour vivre dedans, pas pour spéculer, mais beaucoup de personnes ont spéculé en Chine. Dans le cas chinois, les gens achetaient des parts des futurs projets avant même qu’ils ne commencent. Des gens achetaient jusqu’à cinq ou six appartements et ils profitaient de la hausse du prix du marché entre le moment de l’achat et celui de la livraison.

Mais quand Evergrande, le principal développeur, est entré en crise, beaucoup de leurs appartements n’étaient pas terminés. Les gens se sont trouvés obligés de payer des traites de crédits pour quelque chose qui n’existait pas. C’est pourquoi il y a eu une grève des remboursements en Chine, ce qui a été très intéressant. Le gouvernement a donc dû accepter de prendre les choses en main et de finir les constructions.

Ce sont des choses difficiles à tracer dans le détail. Mais ce que l’on peut déduire de cela, c’est qu’une concentration croissante de la richesse dans 1 ou 10 % de la population augmente la centralisation du capital, autour de sociétés comme Blackstone ou BlackRock. Et pour moi, la menace de la dévaluation réside dans ce phénomène. Crédit Suisse a été racheté par UBS, deux ou trois autres banques ont été sauvées aux États-Unis, je pense qu’il y en aura d’autres… La dévaluation du capital est donc en cours à une échelle déjà significative. Les gouvernements et les banques centrales sont inquiets de ce qu’ils appellent la « contagion », c’est pourquoi ils tentent de contenir la crise. Nous verrons bien jusqu’où ils peuvent aller sans émettre de nouvelles masses de liquidités, puisque les banques centrales tentent de sortir de l’assouplissement quantitatif.

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David Harvey à Paris, en avril 2023. © Photo Sébastien Calvet / Mediapart

Comme Jean-Luc Mélenchon, avec qui vous avez débattu récemment, vous accordez une place importante à la ville dans votre théorie. Qu’est-ce qui vous rapproche de lui sur ce point ?

Je pense que nous partageons une critique de la marchandisation de la ville. La crise du logement est globale. À New York, il y a presque 60 000 sans-abri et des familles s’entassent dans des appartements étroits parce qu’elles ne peuvent rien s’offrir de mieux. Il y a un boom de l’immobilier qui revient à construire des logements pour les classes qui peuvent spéculer, alors que rien n’est fait pour la masse de gens qui désespèrent d’avoir un logement digne. Il faut contrôler les loyers et cesser de marchandiser le logement.

Mais sous le néolibéralisme, tout est marchandisé. C’est pourquoi je ne pense pas que sa fin soit advenue : l’éducation, la santé ou encore le logement sont encore trop marchandisés. Je ne vois aucun parti politique prendre ces questions de manière frontale, sauf Mélenchon et La France insoumise, et il y a beaucoup d’autres choses sur lesquelles nous nous rejoignons.

Vous avez aussi en commun d’intégrer l’aliénation par le temps dans votre critique de la vie urbaine quotidienne…

En effet, je pense, comme Henri Lefebvre [1901-1991, philosophe, inspirateur de l’Internationale situationniste, auteur d’une trilogie sur la Critique de la vie quotidienne – ndlr], que les gens sont aliénés par les conditions de la vie quotidienne, et notamment par le temps volé par le développement du capitalisme. C’est pourquoi je désespère de voir qu’il y a encore des programmes de gauche qui ne se concentrent que sur les conditions de vie matérielles.

Quand on parle d’aliénation, on parle d’un sentiment de perte de sens que l’énorme augmentation de la propagande bourgeoise – à travers les spectacles, les films, le divertissement – ne parvient pas à faire oublier. Je ne pense pas qu’à la fin de la journée, les gens se sentent satisfaits de leur style de vie. La précarité de l’emploi y est pour beaucoup. Dans les années 1960, quand les gens avaient des emplois stables, des positions stables, des voisins qu’ils connaissaient et rencontraient dans la rue, il était plus simple de trouver un sens à sa vie. Aujourd’hui, tout devient éphémère. Il faut qu’un projet politique s’empare de ce sujet, et du droit à la ville.

La théorie post-marxiste de Mélenchon sur « l’ère du peuple » est influencée par les philosophes Ernesto Laclau et Chantal Mouffe, qui considèrent que le « peuple » est le nouveau moteur de l’histoire, et non plus la classe ouvrière. Quelle est votre position sur cette vision ?

Je suis en désaccord avec eux, mais je pense que ce que dit Mélenchon prend une autre direction. J’ai toujours trouvé que la gauche fétichisait la lutte des classes dans les usines de production et avait tendance à traiter les mouvements sociaux urbains, tels que la lutte contre la gentrification, comme des éléments secondaires. Ma version de la théorie marxienne est que ces éléments font partie d’un tout.

Quand certains parlent de « circulation de la capacité productive », moi je vois des travailleurs se battre contre des sociétés de cartes de crédit, contre des propriétaires terriens, contre des entreprises pharmaceutiques ou de téléphonie mobile. Pour moi, ça fait partie de la lutte des classes. Quand Laclau et Mouffe disent qu’il faut dépasser l’idée traditionnelle qu’on se fait du prolétariat, je suis donc sur leur ligne, mais je continue de travailler sur une base marxiste, alors que Laclau, en particulier, a tendance à vouloir jeter le bébé marxiste avec l’eau du bain populiste.

Je n’aime d’ailleurs pas vraiment le mot « populiste », mais je comprends ce que Mélenchon veut dire quand il affirme avoir besoin d’un mouvement qui va s’occuper de tout ce qui ne va pas dans la vie des gens, et pas seulement de la classe ouvrière traditionnelle, même si elle est toujours importante. Pour avoir discuté avec lui, je ne pense pas qu’il se sente particulièrement lié idéologiquement à Laclau et Mouffe, mais il voulait quelque chose de suffisamment large pour construire un parti politique et même, plus largement, un mouvement social autour des transformations de toutes les vies urbaines, et pas seulement des usines de production.

Vous dites qu’il faut intégrer la lutte contre l’aliénation dans un programme politique, mais peut-on construire un programme politique à vocation majoritaire dans la société tout en luttant contre l’aliénation de la majorité de la population ?

Oui, à ceci près qu’il faut régler un problème. Les populations aliénées ont une approche particulière de la participation politique. Elles sont généralement passives et en colère, mais peuvent soudainement devenir actives et très en colère. Et cette colère peut être orientée de différentes manières. Les populations aliénées ne soutiennent pas forcément des programmes de gauche, elles peuvent devenir fascistes, et de fait, il y a assez de preuves que, ces derniers temps, elles sont allées davantage vers l’extrême droite que vers la gauche.

La gauche doit capter cette colère et mobiliser ces populations qui ont une attitude passive-agressive. Malheureusement, elle ne s’y attelle pas. En Grande-Bretagne, au moindre signe de colère, le parti travailliste se retire en condamnant des « extrémistes ». Quand dernièrement trois parlementaires travaillistes ont osé rejoindre un piquet de grève, ils ont été exclus par les dirigeants du parti ! Le parti travailliste est au point mort. C’est pourquoi je pense qu’on peut apprendre de Mélenchon qui, pour ce que j’en sais, partage cette colère et n’en a pas peur : il sait d’où elle vient.

Illustration 3
David Harvey à Paris, en avril 2023. © Photo Sébastien Calvet / Mediapart

Dans Une brève histoire du néolibéralisme (Les Prairies ordinaires, 2017), vous écriviez que le néolibéralisme ne pourrait survivre qu’en devenant violent et autocratique. N’est-ce pas ce qu’on observe en France aujourd’hui dans l’attitude de Macron face aux mobilisations contre la réforme des retraites ?

Oui, c’est ce qu’on a sous les yeux, clairement. On se rapproche du fascisme des années 1930, c’est ce contre quoi il faut lutter.

Tout indique que la France est dans une impasse, entre un pouvoir sourd et une mobilisation qui s’épuise du fait de la répression. Vous qui avez travaillé sur les mouvements révolutionnaires et leur dimension urbaine, pensez-vous qu’une révolution du type du XIXe siècle peut encore arriver aujourd’hui ?

La situation aujourd’hui est radicalement différente de celle du XIXe siècle. Il n’y aura plus de prise de la Bastille ou de prise du Palais d’Hiver possible. Si on devait attaquer quelque chose, ça devrait être les banques centrales, mais que ferait-on une fois dedans ? (Rires) Durant la Commune de Paris, les insurgés ont, à l’inverse, protégé la Banque de France, et ils ne se sont rendu compte de leur erreur que trop tard. Aujourd’hui, le capitalisme est organisé d’une telle manière qu’à certains égards, il me semble quasiment trop gros pour s’effondrer.

Même si vous êtes pour une transition au socialisme, je devine que vous voudrez toujours avoir des téléphones portables, des ordinateurs, et donc Internet. Or, comment sont-ils fabriqués et par qui ? Ces entreprises sont rationalisées. Il est possible que, si elles s’effondrent, il n’y ait plus d’ordinateurs ni de téléphones portables. Si c’est ça le socialisme, il y a fort à parier que les gens vont réclamer le retour du capitalisme ! Les gens m’en veulent quand je dis ça, mais de manière réaliste, pouvez-vous imaginer une société socialiste qui préfère rejeter les ordinateurs, les outils de communication, l’intelligence artificielle au lieu de les utiliser ? Il faut y réfléchir.

J’aime beaucoup la réplique d’Henri Lefebvre quand on lui demandait pourquoi il était marxiste et pas anarchiste : “Je suis marxiste pour qu’un jour on puisse tous vivre comme des anarchistes !”

David Harvey

Étant donné qu’il est difficile de révolutionner la vie urbaine quotidienne et qu’il y a une conscience écologique de plus en plus aiguë, ne pensez-vous pas, comme Kristin Ross, que les révolutions partiront désormais des campagnes, des zones à défendre ?

Toute l’histoire du capital est parsemée de mouvements alternatifs de ce type. Ils ne sont ni absurdes ni inutiles. Ces mouvements peuvent être les germes de la construction d’une alternative réelle. Si je pouvais tout planifier, je m’assurerais qu’on sorte de la métropolisation, les gens travailleraient à distance de la métropole – c’est désormais possible –, les structures communales seraient écologiques, les gens auraient tous leur parcelle de terrain pour cultiver des légumes. C’est une réponse importante aux problèmes soulevés par l’agriculture capitaliste. Je vivais en Grande-Bretagne durant la Seconde Guerre mondiale, quand 50 % de la production alimentaire venait des potagers des gens ! Il y beaucoup de choses qui peuvent naître de ces alternatives. Là encore, ça va me causer des problèmes avec les marxistes orthodoxes, car parfois, je dis des choses qui me font passer pour un anarchiste ! (Rires)

En fait, vous êtes plus Kropotkine que Marx !

Oui, et Élisée Reclus ! Je les aime bien. J’aime beaucoup la réplique d’Henri Lefebvre quand on lui demandait pourquoi il était marxiste et pas anarchiste : « Je suis marxiste pour qu’un jour on puisse tous vivre comme des anarchistes ! » C’est une très bonne réponse ! Je suis un anarchiste ancien modèle, j’aime lire Murray Bookchin, Kropotkine, Élisée Reclus, ça mérite d’être incorporé, et amélioré, à nos considérations. Cela fait sans doute de moi une sorte d’hérétique.

Vous avec beaucoup fait pour aider la pensée marxiste à survivre au rouleau compresseur néolibéral. Vous avez récemment publié A Companion to Marx’s Grundrisse (Verso, 2022, non traduit). Pourquoi est-il toujours important pour vous de lire Marx et de parler de sa pensée ?

Vous pourriez dire que je suis un peu obsessionnel ! La première raison, c’est que je ne supporte pas le courant hégémonique de l’économie contemporaine. C’est tellement erroné ! Je pense que Marx a construit une manière de comprendre le capital et l’économie qui est bien plus précise et pertinente que celle des économistes bourgeois. Je veux les défier. Ce n’est pas facile, car ils ont l’argent, ils ont les médias, ils ont la « crédibilité ». Mais prenons des exemples.

David Ricardo [économiste britannique, 1772-1823 – ndlr] avait une théorie de la valeur liée au travail. Beaucoup de gens qui travaillent sur cette tradition regardent la situation et disent : si le travail est la source de toute valeur, comment se fait-il que le travail soit si peu rémunéré ? C’est une question morale évidente ! C’est de là que vient le « socialisme ricardien » dans les années 1840, qui a donné naissance au socialisme de John Stuart Mill [économiste britannique, 1806-1873 – ndlr]. Celui-ci affirme qu’on ne peut rien faire au niveau de la production, mais qu’on peut redistribuer autant que possible la valeur aux gens qui la produisent. Thomas Piketty, Elizabeth Warren et Bernie Sanders s’inscrivent dans cette tradition.

Marx n’aimait pas cette tradition parce qu’elle ne prend pas en compte la production. Mais elle pose une question morale fondamentale, qui est devenue très puissante dans le mouvement chartiste, dans les années 1840 [un mouvement ouvrier qui s’est développé au Royaume-Uni au milieu du XIXe siècle, après l’adoption de la « Charte du peuple » – ndlr].

Puis, des économistes marginaux ont dit : il ne faut plus penser la valeur seulement à partir du travail, mais en additionnant la valeur de la propriété, du capital et du travail. L’importance de ces trois facteurs de la production vient de leur rareté relative : si les capitalistes ont peur de manquer, ils sont légitimes à recevoir bien plus que le travail, qui est abondant. Les grands patrons de Manchester étaient ravis de cette nouvelle théorie économique car elle éradique la question morale, et la théorie de John Stuart Mill n’a survécu qu’à travers certaines formes de social-démocratie à partir de 1945.

Aujourd’hui, le capital repose toujours sur cette théorie de la valeur ! Elle légitime des taux de rentabilité plus élevés pour le capital, à tel point qu’il y a des capitaux excédentaires. Il devrait donc y avoir un rééquilibrage en faveur du travail, mais bien sûr ce n’est pas ce qui se produit. Si vous dites à un économiste, dans n’importe quelle faculté, de prendre cette théorie de la valeur au sérieux, il vous rira au nez ! C’est ridicule.

C’est pourquoi il faut revenir à cette question morale. Car, une fois que vous l’avez posée, les gens commencent à s’interroger et, dès lors, il est possible de passer à la prochaine étape qui est de poser la question de la destruction de la production capitaliste. C’est pour cette raison que Marx me donne une alternative. Il pense que le capital n’est pas quelque chose, comme le pensent les économistes bourgeois, mais que c’est un processus dans lequel il prend différentes formes. Il a cette incroyable flexibilité.

D’autre part, Marx m’est très utile pour comprendre des phénomènes d’urbanisation. Marx explique par exemple que les capitalistes investissent dans des activités improductives à dessein, pour éviter le surplus de production créé par leurs investissements. Regardez l’urbanisation contemporaine dans les États du Golfe, c’est assez éloquent ! Les capitalistes investissent dans des activités improductives, à des taux énormes, pour faire du profit. Ils le font en partie pour des raisons écologiques car la pression sur l’environnement serait autrement catastrophique.

Mon objectif est de diffuser une théorie marxiste qui soit compréhensible, d’être pédagogue, pour que les syndicats et les mouvements sociaux puissent s’en saisir. En un sens, c’est la raison pour laquelle l’hégémonie marxiste s'est effondrée dans les années 1980 : trop sophistiquée, elle n’avait pas de camp de base réel pour expliquer ce qui se passait dans la vie quotidienne. Je pense que cette erreur est en cours de réparation.

https://www.mediapart.fr/journal/politique/180423/david-harvey-en-france-le-neoliberalisme-devient-violent-et-autocratique

tchicketchacke@pod.g3l.org

OOOPS ! Petites modifications et j’avais oublié de rajouter quelques tags !
#Meeting #historique ce #samedi 22 #octobre à l’ #espace #Charenton à #Paris où plus de 1800 #travailleurs et #jeunes se sont rassemblés contre la #guerre et l’#exploitation. Sous la #présidence de Daniel #GLUCKSTEIN, #coordinateur du #Comité #ouvrier #international contre la guerre et l’exploitation, pour l’ #Internationale #ouvrière ( #COI ), ont pris la #parole :

#AFGHANISTAN :
Freshta AMIRI, #militante de la #Gauche #radicale d’Afghanistan ( #LRA ), partie prenante des #manifestations de #femmes et d’ #écolières pour la #réouverture des #écoles

#ALLEMAGNE :
Claudius NAUMANN, militant internationaliste, #président du conseil des #délégués du #personnel de l’ #Université #libre de #Berlin.

#BIÉLORUSSIE, #RUSSIE ET #UKRAINE :
Des militantes et des militants qui combattent contre la guerre et pour le #socialisme.

#BURKINA_FASO
Adama COULIBALY, de l’ #Alternative #patriotique #panafricaine-Burkindi ( #APP-B ).

#ÉTATS-UNIS
Alan BENJAMIN, militant de #Socialist-Organizer, l’un des #fondateurs de #US_Labor_Against The #War (Le mouvement ouvrier #américain contre la guerre).

#FRANCE
Christel KEISER, #secrétaire nationale du #Parti-ouvrier-indépendant-démocratique ( #POID ).
Une militante de la #Fédération des jeunes #révolutionnaires ( #FJR ).

#GRANDE-BRETAGNE
Ian HODSON, président du #syndicat des travailleurs de l’ #alimentation Bakers, Food and Allied Workers Union ( #BFAWU ).

#PALESTINE
Une militante, au nom de l’association #Secular-Palestine, qui milite pour une Palestine #laïque et #démocratique.
Des #vidéo-messages de militants d’ #IRAN, du #SRI_LANKA et de #CHINE ont été projetés.
https://www.youtube.com/watch?v=gyVvalxRhLw

berternste@pod.orkz.net

Woke heeft bewonderenswaardige emoties, maar doet afstand van universalisme, zegt moraalfilosoof Susan Neiman

De Volkskrant

De Amerikaanse moraalfilosoof Susan Neiman werd beroemd door haar studie naar de wortels van het kwaad. In de veertigste Van der Leeuwlezing richt ze haar pijlen op nieuwe progressieve bewegingen. ‘Woke mensen hebben bewonderenswaardige emoties, maar de verkeerde theorieën. (...)

Dat nieuwe boek vormt de basis voor de 40ste Van der Leeuwlezing, die Neiman op 4 november zal uitspreken in de Groningse Martinikerk. De polemische titel: Why Left is not Woke. Neiman is fel gekant tegen wat zij ziet als een hang naar ‘diversiteit über alles’ in de progressieve kringen waarin zij zich ook begeeft. In Why left is not Woke richt de linkse intellectueel haar pijlen op een soort tribalisme dat volgens Neiman welig tiert op de linkerflank van het politieke spectrum, zowel in Europa als in de Verenigde Staten. (...)

Wie of wat bedoelt u als u het heeft over ‘woke’?
‘Dan heb ik het over mensen die linkse emoties koesteren, die zich diep betrokken voelen bij het lot van onderdrukte minderheden, die geven om sociale rechtvaardigheid en willen handelen om positieve verandering teweeg te brengen. Ze hebben bewonderenswaardige emoties, alleen de verkeerde theorieën, ze doen afstand van ideeën die ik als noodzakelijk beschouw voor links: universalisme, het geloof in vooruitgang en een strikte scheiding tussen macht en rechtvaardigheid.’ (...)

De in Amerika geboren, in Berlijn woonachtige Neiman is zelf een devote aanhanger van het universalisme; het in de Verlichting van de 18de eeuw gestolde idee van een universele mensenrechten, van waarden die mensen ongeacht etnische, culturele of nationale verschillen met elkaar delen. (...)

Sinds 2000 is ze directeur van het researchcentrum Einstein Forum in Potsdam. In die hoedanigheid, maar ook als verdediger van de waarden van de door haar zo gekoesterde Verlichting, ziet Neiman met lede ogen aan dat etniciteit en gender allesbepalend zijn geworden. ‘Neem Hillary Clinton, die onlangs in een interview de overwinning van de rechts-radicale Italiaanse politica Giorgia Meloni prees omdat ‘elke vrouw die wordt gekozen tot staatshoofd of hoofd van een regering een stap voorwaarts is’. Ik haat dat, ik haat dat! Het doet me denken aan een boek dat onlangs uitkwam, over vrouwen in de CIA. het centrale punt van het boek is dat de CIA veel beter is dan we denken, omdat er vanaf het begin coole vrouwen werkten. Alsof bijdragen aan marteling en moord op enigerlei wijze minder erg is als het door vrouwen wordt gedaan. Of de Britse regering, die wordt geprezen omdat zij zo divers is, terwijl het zo’n beetje de slechtste regering is die het Verenigd Koninkrijk ooit heeft gehad.’

U claimt in uw boek dat links ten prooi valt aan tribalisme. Wat bedoelt u daarmee?
‘Met tribalisme bedoel ik het idee dat je alleen maar een verbinding of serieuze verplichting aan gaat met mensen die tot je eigen groep behoren. Ik hoorde voor het eerst de term woke zo’n vier jaar geleden, en ik vatte het toen op als een compliment, een term die van zwarte activisten kwam en zoiets betekende als wakker zijn, de ogen geopend hebben voor de vele vormen van racisme, ook de vormen die niet opzettelijk zijn. Maar het is uitgemond in een nadruk op ras en gender, en zo’n focus binnen linkse kringen op machtsverschillen op het gebied van gender en etniciteit, dat andere grote problemen niet worden aangepakt.’ (...)

U verwijt linkse activisten dat ze minderheidsgroepen reduceren tot uitsluitend slachtoffers van racisme of seksisme. Maar feministen, antiracisten en transgender activisten zullen zeggen: dat reduceren doen wij niet, wij zetten ons juist af tegen de beperkende identiteit die ons is opgelegd
‘Zo begon woke natuurlijk ook. Het Black Lives Matter-protest uit 2020 is de grootste sociale beweging van Amerika, nooit eerder protesteerden zoveel mensen tegen racisme en waren de demonstranten zo divers: meer dan de helft was wit en dat midden in een levensbedreigende pandemie. Ik vond dat een zeer hoopvol moment in de geschiedenis, en helemaal niet tribalistisch. Trump bekritiseerde de protesten door te zeggen dat ze een gevaarlijke vorm van identiteitspolitiek waren, terwijl de demonstranten universele waarden uitdroegen: we wilden allemaal dat het politiegeweld tegen ongewapende zwarte mannen zou stoppen. Maar toen zeiden sommige leiders van Black Lives Matter dat het inderdaad identiteitspolitiek was, ze suggereerden dat het hun strijd was, en dat witte mensen hoogstens bondgenoten kunnen zijn. Nou, ik ben geen bondgenoot. Een bondgenoot is iemand wiens belangen tijdelijk samengaan met die van jou, niet iemand die ten diepste strijdt voor dezelfde principes.’ (...)

**U verzet zich hevig tegen wat u beschrijft als ‘enlightment bashing’ onder linkse denkers en wetenschappers op het gebied van postkoloniale theorie: het idee dat de Verlichting, die wordt geassocieerd met rationalisme en de erkenning van individuele rechten, in feite diep eurocentrisch was.
‘Ja, dat klopt gewoon echt niet! Verlichtingsdenkers drongen er juist op aan dat Europa zichzelf zou zien vanuit het perspectief van non-Europeanen en ze namen daarmee gigantische risico’s. Een beroemd voorbeeld uit de eerste helft van de achttiende eeuw is de filosoof Christian Wolff, door wie Immanuel Kant is beïnvloed. Wolff bestudeerde Chinese filosofie en stelde dat deze van morele waarde was, al was die niet christelijk. Hij kreeg vervolgens 48 uur de tijd om zijn hoogleraarschap op te zeggen, anders zou hij worden onthoofd. Als ik activisten zie twitteren dat de Verlichting eurocentrisch is, dan denk ik: jongens, verdiep je een beetje in de geschiedenis. Mensen hebben echte offers gebracht.’ (...)

‘Bijna alle verlichtingsdenkers hebben wel eens racistische opmerkingen gemaakt. Dat waren vaak ondoordachte opmerkingen, die haaks staan op hun filosofieën. Wat mensen zich te weinig realiseren is dat diezelfde denkers ook de sterkste kritiek op kolonialisme hadden, die kritiek wordt nooit geciteerd. Neem Diderot, zijn felle teksten zou je zo kunnen verwarren met die van Frantz Fanon (Frans-Martinikaanse psychiater, geestelijk vader van het post-kolonialisme, red.). Mensen graven altijd die paar racistische citaten van Kant op, maar reppen niet over zijn kritiek op kolonialisme en de universele waarden die hij uitdroeg. Kant zou de eerste zijn om toe te geven dat iedereen zijn beperkingen heeft en dat hij niet over alles gelijk had.’

Verlichtingsdenkers waren uitgesproken seksisten.
‘Dat klopt, daar kun je niet omheen. Ik heb daar lang over nagedacht, en ben op een plek uitgekomen waar ik ze enigszins kan vergeven. Ik ontdekte dat vrouwen uit die tijd gemiddeld vijf kinderen baarden, er was een gigantische kinder-moedersterfte. De levens van vrouwen waren biologisch gezien zo anders dan die van mannen, tenzij je naar het klooster ging, en daar zaten wel veel nadenkende vrouwen. De mechaniek van bevallen had zo’n beperkende invloed op vrouwenlevens en deze mannen gingen ervan uit dat dit altijd zo zou blijven, en vrouwen nooit dezelfde levens en rechten zouden kunnen krijgen.’ Ze zakt even achterover in haar stoel: ‘Ben ik deze mannen aan het verdedigen? Nee, ik probeer te begrijpen waarom denkers als Rousseau, Diderot en Kant zo hoog opgaven van het idee dat alle mensen, ongeacht etniciteit en culturele achtergrond, fundamenteel gelijke rechten hebben, maar dat niet dachten over de vrouwen die naast hen woonden.’ (...)

In uw boek en lezing klinkt kritiek door op de prioriteiten onder linkse mensen. Ze zouden te veel belang hechten aan voornaamwoorden en andere genderkwesties en te weinig oog hebben voor de grote gevaren.
‘Ik vind dat de voornamen-kwestie (het belang dat nonbinaire mensen aan de keuzevrijheid voor voornaamwoorden als hen of die, red.) wordt gepresenteerd alsof het een kwestie van leven en dood is. Dat is niet zo. Waar we wel mee te maken hebben is oprukkend fascisme, en op dit moment is er zelfs sprake van een nucleaire dreiging! Als fascisten erin slagen om aan de macht te komen, dan worden transgenders en non-binaire mensen als eerste onderdrukt. Wie dat niet inziet, is gewoon politie[k] naïef. Ik ben aangevallen op deze mening, maar mij gaat het om prioriteiten stellen. Als ik als vrouw mijn rechten moest opgeven om een nucleaire oorlog te voorkomen en fascisme te bestrijden, ik dat zou doen.’ (...)

Wat zouden linkse partijen in de tussentijd moeten doen om fascisme te bestrijden?
‘Een universele agenda formuleren die grote groepen mensen samenbrengt, een ijzersterk front vormen tegen antidemocratische krachten. Daarbij geef ik graag een historisch voorbeeld: als de sociaaldemocraten en de communisten hadden samengewerkt, dan hadden we geen Tweede Wereldoorlog gehad. Rechts is ontzettend goed georganiseerd, allerlei rechtse bewegingen en voormannen, van Steve Bannon tot het Alternative für Deutschland komen samen en nodigen elkaar uit, ze zweren samen en zijn daar zeer succesvol in. Links zou zich daar bewust moeten worden en daar veel meer naar moeten handelen.’ (...)

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Susan Neiman

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Twitter en Facebook gaan ons niet redden

NRC

Bingewatch-maatschappij - In Kapitalistisch realisme van Mark Fisher wordt beschreven hoe de ‘consument-toeschouwer’ doelloos ronddoolt in een gedepolitiseerde maatschappelijke orde. Is opstand nog wel mogelijk? (...)

In Kapitalistisch realisme legt Fisher ‘met meedogenloze luciditeit’ (Sebastiaan Olma in zijn nawoord) de culturele effecten bloot van het late kapitalisme en de illusie dat er ‘geen alternatief’ zou zijn. In de decennia na de val van de Muur en de ondergang van het ‘reëel bestaande socialisme’ zijn inmiddels hele generaties opgegroeid die het ontbreken van zo’n alternatief niet eens meer als probleem zien, aldus Fisher. ‘Het kapitalisme neemt naadloos de horizon van het denkbare in beslag’. Ook is de relatie vervlogen met het oudere, kapitalistische modernisme, dat nog werd gekenmerkt door paternalistisch geloof in innovatie en collectieve vooruitgang. Wat rest is de figuur van de ‘consument-toeschouwer, die door de ruïnes en relikwieën sjokt’. Series bingen is de ‘post-geletterde subjectiviteit van de laat-kapitalistische consument’ – een observatie die doet denken aan Herbert Marcuse’s One-Dimensional Man (1964).

Fishers filippica tegen die ogenschijnlijk onwrikbare, gedepolitiseerde maatschappelijke orde sloeg aan onder linkse intellectuelen en activisten. Zijn afkeer van de ‘geen alternatief’-mantra zal ook nu nog tot de verbeelding spreken van cohorten jongeren voor wie sociale mobiliteit en politieke turbulentie hooguit een vaag verhaal uit het verleden zijn (van ‘boomers’) en die zelf alleen het ideologisch stilstaande water kennen van ‘neoliberaal’ Nederland. (...)

Het werk van Fisher spreekt vermoedelijk ook aan omdat hij niet de klassenstrijd bezingt, zoals orthodoxe marxisten, maar zijn schuldbewuste lezers oproept te accepteren ‘dat we op het niveau van het verlangen meedraaien in de meedogenloze vleesmolen van het kapitaal’. Eerst moet de neoliberale meeloper in onszelf worden herkend. Als dan de bezwering ‘geen alternatief’ eenmaal is ontmaskerd als een dooddoener en de orde in zijn voegen begint te kraken, kan een ‘gerevitaliseerd links’ ontdekken dat plotseling weer ‘alles mogelijk’ is. Ook dat is een reprise van een oudere slogan: de verbeelding aan de macht. (...)

Hele artikel

Foto van straat met slogan op muur: ‘Slaaf van het geld’
Nederland, Breda, juni 2022. Foto ANP / Hollandse Hoogte / Peter Hilz.

Tags: #nederlands #boeken #mark_fisher #fisher #maatschappij #kapitalisme #facebook #twitter #sociale_media #consument #politiek #opstand #protest #socialisme #modernisme #maatschappij #hebert_marcuse #marcuse #one-dimensional_man #fordisme #post-fordisme

namas@diaspora-fr.org

Mon frère : https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/il-nous-faut-un-parlement-fort-face-a-un-president-fort
(je suis fier :*) #adelphité #socialisme #politique

Je trouve ta proposition excellente, André, même si contrairement à toi, je ne crois plus au système parlementaire à l'ancienne #anarchie #communalisme #FédéTribusArcEnCiel #Bolobolo...

Ça ne m'empêchera pas d'aller voter dimanche, mais ça va être chaud hélas : chez moi 3e circo 35, la candidate Nupes c'est une socialiste, et en 2017 déjà elle avait voté Valls ! alors au premier tour ce sera sans moi... et à côté ya que le noir&blanc (anarchie/hermine) qui tiennent de façons crédible à mes yeux : le rouge est octogénaire et la verte est animaliste... pardon pour l'âgisme et le spécisme mais... sinon, un poème de nouveau ? si j'avais été juste à quelques kilomètres de là j'aurais pas hésité :*/ mais bon au deuxième tour on verra #inch'allah de toutes façons mon #influence est très mineure à l'échelle de l'#Univers

Si je voulais critiquer ta tribune je dirais deux choses :
D'une part il me semble que la République n'a pas besoin de nous pour être enterrée... et que ça ne saurait plus tarder beaucoup. Que seules les minorités pour l'heure soient conscientes du point de vue politique, c'est une évidence triste mais :
- ça ne me force pas à donner quittus à des histrions
- n'oublions pas le centième singe et la patiente puissance des cellules imaginales

D'autre part et surtout, la proposition me semble difficilement tenable pour un système politique qui se fout royalement de la démocratie, et qui le démontre implacablement depuis ... belle lurette : au moins depuis que le mot de démocratie est utilisé en France. Avec de plus en plus d'insolence, je dirais. #Chomsky #Tiqqun ou #BelhajKacem

Mais je pinaille, je conspire et je prospective effondriste comme d'hab' : pour l'heure et basiquement, je te soutiens à 99%.a

berternste@pod.orkz.net

Karl Marx, wie kent hem nog?

Foto van affiche met Marx

Utrecht 2021

Een affiche met Karl Marx zie je niet vaak meer. Door de uitwassen van het communisme van Stalin en Mao en de ideologie van het kapitalisme (neoliberalisme) staan Karl Marx, marxisme en communisme in veler ogen in een kwade reuk. Zelfs socialisme is inmiddels in voor velen een verdacht idee.

Gezien de nare uitwassen van het kapitalisme (moderne slavernij, uitbuiting door flexwerk en uitzendbureaus, ongebreidelde vernietiging van natuur en milieu en zo meer) moeten we een en ander maar eens opnieuw doordenken. Kunnen we echt niet een beter maatschappijmodel ontwerpen?

#antonie-pannekoek #capitalism #communism #communisme #foto #fotografie #jan-appel #kapitalisme #karl-marx #marx #marxism #marxisme #neoliberalism #neoliberalisme #netherlands #pannekoek #photo #photography #radencommunisme #socialism #socialisme #utrecht

Originally posted at: https://blog.ernste.net/2022/04/27/karl-marx-wie-kent-hem-nog/

wazoox@diasp.eu

Le socialisme de Blum peut-il nous sauver en 2022 ? – Le Temps des Ruptures

#politique #socialisme

Je ne crois pas qu’il change de conceptions. Disons que les représentations marxistes et celle du « jauréssisme » ont toujours cohabité à l’intérieur de la SFIO, et Blum lui-même essaie, comme tant d’autres, de les harmoniser. Sa vie militante est faite d’une alternance entre majoration marxiste et minoration jauréssienne et inversement. L’enjeu intellectuel de tenir les deux bouts rejoignant un enjeu très politique d’unité de la SFIO dont il s’estime le garant. Mais de ce point de vue, en effet, la SFIO dont Blum est le leader parlementaire dans l’entre-deux-guerres est fortement dominée par le marxisme de tradition guesdiste que représente son Secrétaire Général, Paul Faure. Marxisme qui pèse sur un Blum qui, jusqu’en 1920 s’était montré bien plus jauressien. De ce point de vue, À l’échelle humaine représente le dernier épisode du « moment marxiste » de Léon Blum, un marxisme bien hétérodoxe néanmoins.

https://letempsdesruptures.fr/index.php/2022/04/21/le-socialisme-de-blum-peut-il-nous-sauver-en-2022/